Qu’est ce qu’un neurinome de l’acoustique ?

Le neurinome de l’acoustique ou schwannome concerne environ 10 personnes sur un million par an. Cette tumeur bénigne (non cancéreuse) se présente sous la forme d’une petite grosseur dans l’oreille interne et peut s’étendre à l’intérieur du cerveau.

C’est une tumeur bénigne dérivant des cellules de Schwann (qui élaborent normalement la gaine de myéline des fibres contenues dans les nerfs), et survenant deux fois plus souvent sur la branche vestibulaire de la 8e paire crânienne (voir ci-après), que sur la branche du nerf auditif. Le neurinome de l’acoustique représente environ 7 % de toutes les tumeurs situées à l’intérieur du crâne. Sa cause est pour l’instant inconnue.

Cette variété de neurinome atteint les personnes entre 30 et 60 ans, (ou même plus jeunes) et plus particulièrement de sexe féminin. L’extension de la tumeur va se faire de l’intérieur du conduit auditif interne vers l’angle pond au cérébelleux (zone du système nerveux de l’encéphale située entre le cervelet en arrière, la moelle épinière en bas et le cerveau au-dessus). A cet endroit il se développe et va comprimer progressivement et plus ou moins lentement le cervelet et le tronc cérébral puis les 5ème et 7ème paires crâniennes.

Quels sont les symptômes du neurinome de l’acoustique?

Voici les principales manifestations:

  • Perte auditive unilatérale progressive
  • Acouphènes (bourdonnements ou sifflements dans l’oreille)
  • Vertiges, déséquilibre, sensation vertigineuse notamment dans la pénombre
  • Ataxie ou difficultés de coordination
  • Parfois, des symptômes plus graves tels que des maux de tête et des changements dans la perception faciale, troubles de la déglutition peuvent survenir si la tumeur est grande.

L’ acouphène unilatéral (de type sifflement ou bourdonnement) est le signe le plus sensible, mais le moins spécifique (80 %). La baisse de l’acuité auditive, surdité unilatérale ou bilatérale avec forte prédominance d’un côté est le signe le plus spécifique (75 %). Les autres signes sont l’ataxie ( troubles de l’équilibre) une instabilité, même transitoire (16 %), vertiges répétés et larvés (2 %), une hémi-anesthésie par atteinte du V (20 %), des céphalées (30 %).

Une surdité unilatérale ou asymétrique doit éveiller les soupçons et nécessite des investigations complémentaires.

Comment faire le diagnostic du neurinome?

Le diagnostic du neurinome de l’acoustique s’appuie principalement sur l’évaluation de l’audition et des fonctions vestibulaires, ainsi que sur l’imagerie par résonance magnétique (IRM) du cerveau et de l’oreille interne.

  • L’audiogramme:

Il révèle généralement une perte auditive neurosensorielle unilatérale (surdité de perception), ou une aggravation unilatérale chez les patients souffrant déjà d’une perte auditive bilatérale. Pour compléter l’évaluation diagnostique ou préparer le traitement, d’autres tests cochléo-vestibulaires peuvent être utilisés, tels que les potentiels évoqués auditifs, qui mesurent l’activité électrique du nerf auditif, et la vidéonystagmographie, qui est utilisée pour examiner les troubles de l’équilibre.

  • L’IRM:

Elle est considérée comme l’examen le plus fiable et le plus précis pour diagnostiquer un neurinome. Elle permet également de déterminer avec exactitude la taille, la localisation, l’étendue de la tumeur et son impact sur les structures avoisinantes. L’IRM avec injection de gadolinium donnera un résultat plus précis.

  • Le scanner:

Bien que le scanner soit moins fiable et sensible que l’IRM pour le diagnostic des neurinomes, il peut fournir des informations précieuses aux chirurgiens (ORL et neurochirurgiens) pour élaborer une stratégie thérapeutique.

  • PEA (Potentiels Evoqués Auditifs) :

Les potentiels évoqués du tronc cérébral constituent une épreuve utilisée pour mettre en évidence une lésion d’origine neurologique. Ils permettent l’étude de l’activité électrique des nerfs appartenant au système de l’audition, de la vision et de la sensibilité en général. Le résultat est une réponse électrique à des stimulations des différentes natures (auditives, visuelles, sensitives).

  • Les épreuves caloriques:

Chez les patients présentant un neurinome de l’acoustique, l’épreuve calorique peut révéler une hyporéactivité ou une non-réactivité du côté affecté par la tumeur. Cela est dû à l’effet de compression ou de déplacement du nerf vestibulaire par la tumeur, ce qui peut réduire ou inhiber la transmission des signaux vestibulaires. L’asymétrie dans les réponses caloriques entre les deux oreilles est un indicateur significatif qui peut orienter le clinicien vers un diagnostic de neurinome de l’acoustique.

Comment peut évoluer un neurinome de l’acoustique?

L’augmentation de volume (très lente) du neurinome dans la cavité de l’oreille interne peut provoquer les signes suivants : Fourmillements au visage, douleurs au niveau du visage, dues à une atteinte de la région du nerf trijumeau au niveau de la face, paralysie de la zone du visage correspondant à l’innervation par le nerf facial, entraînant une atteinte des muscles faciaux, anesthésie de la cornée du côté du neurinome.

Quels sont les traitements?

Quatre sortes de traitements sont possibles selon la grosseur et la localisation du neurinome.

  • Le Gamma Knife

La radiochirurgie aux rayons gamma pour les neurinomes inférieurs a 3cm (gamma knife).La radiochirurgie préserve l’audition et ne crée pas de paralysie faciale. Dans 95% des cas, après radiochirurgie, la tumeur n’évolue plus et on assiste à une nécrose progressive de la lésion parfois, il est vrai, sans modification volumétrique significative. Cela n’est pas dangereux. Le recul actuel de cette technique est de plus de 30 ans. Dans ± 5% des cas seulement, une intervention doit être envisagée secondairement. Les rayons gamma knife sont faits en une seule séance, 201 rayons sont ciblés sur le neurinome. Ils agissent pendant trois ans environ. Ce n’est qu’au bout de ces 3 années que l’on verra le résultat définitif du traitement. On peut éventuellement faire une autre séance de rayons si nécessaire. La chirurgie est possible après un traitement GK (Gamma Knife)

  • La chirurgie :

Le traitement chirurgical consiste en une ablation de la tumeur qui, comme lors de neurinome des nerfs rachidiens, nécessite un diagnostic précoce. L’opération risque toutefois d’abîmer le nerf crânien numéro VIII et, de ce fait, peut provoquer une paralysie faciale. Les tumeurs de petits volumes peuvent êtres enlevées par microchirurgie. Ceci permet généralement d’épargner le nerf facial si le chirurgien utilise la voie qui emprunte la fosse cérébrale moyenne de façon à préserver l’audition résiduelle. Une autre voie est la voie trans-labyrinthique (à travers le labyrinthe) à condition que la fonction auditive soit totalement supprimée. Les tumeurs plus volumineuses sont enlevées à travers le labyrinthe et par la voie sous-occipitale. La chirurgie ou neurochirurgie du neurinome du VIII est une chirurgie compliquée et elle comporte des risques importants. Elle est  pratiquée par les ORL en collaboration avec des neurochirurgiens.

  • L’opération et la radiochirurgie :

Lorsque la tumeur est très grosse, il arrive que l’on opère en enlevant le plus gros de la tumeur et que l’on fasse pour ce qui reste les rayons gamma. Cela évite de trop abîmer les nerfs facial et auditif, et de limiter les séquelles.

  • La radiothérapie stéréotaxique :

La radiothérapie stéréotaxique représente une méthode de traitement non invasive pour les neurinomes de l’acoustique, particulièrement utile chez les patients pour lesquels la chirurgie représente un risque élevé ou ceux qui préfèrent une alternative moins invasive. Cette technique utilise des faisceaux de radiations de haute précision pour cibler la tumeur, minimisant ainsi les dommages aux tissus sains environnants.

  • La surveillance:

Une autre solution, lorsque la tumeur est petite, c’est de la « surveiller » régulièrement par des IRM et, si elle ne « bouge » pas du tout, de ne faire aucun des traitements précédents. L’évolution du neurinome de l’acoustique est en principe lente et il arrive quelques fois que le neurinome ne grossisse pas pendant de nombreuses années. Dans l’un ou l’autre des traitements cités, un contrôle par IRM sera fait tous les 6 mois au début, puis tous les ans, puis tous les 5 ans, afin de bien surveiller l’évolution et détecter éventuellement une récidive.

Est il possible de porter un appareil auditif si je souffre d’un neurinome de l’acoustique?

La réponse est oui. Le choix de l’appareil va dépendre du niveau et de la qualité de l’audition résiduelle.

  • Si l’audiométrie vocale est conservée du côté du neurinome:

Si l’audiométrie vocale est conservée, cela signifie qu’il sera possible de tirer un bénéfice significatif de l’appareillage auditif. Il faudra probablement adapter les réglages de l’aide auditive en fonction des seuils de conforts, des seuils d’inconfort et de la présence d’un éventuel recrutement (intolérance aux sons forts). Le recrutement est un phénomène fréquent lorsque le nerf auditif est abîmé par le neurinome de l’acoustique.

  • Si l’audiométrie vocale est fortement dégradée du côté du neurinome:

Si l’audiométrie vocale est fortement dégradée, un appareillage conventionnel du côté du neurinome donnera probablement un résultat décevant avec une faible amélioration de la capacité de compréhension lorsque un interlocuteur se trouve du côté sourd. La solution optimale sera alors un système TRi-Cros, Active Cros ou Stéréo Cros. Le principe est de router l’information perçue du coté de la mauvaise oreille vers la bonne oreille tout en apportant une petite stimulation sonore sur la mauvaise.

  • Si il n’y a plus d’audition (cophose) du côté du neurinome:

Si il n’y a plus d’audition (cophose) du côté du neurinome, la solution qui soit être envisagée est un système Cros qui consiste à router le signal perçu du côté de l’oreille qui n’entend plus vers l’oreille qui entend. Il existe aujourd’hui deux types de systèmes Cros, les Cros avec appareil auditif à ancrage osseux (Cochlear Baha, Otico Ponto) et  les Cros avec appareil auditif en conduction aérienne (Phonak Cros, Starkey Cros, Signia Cros). Le système Cros permet de rétablir une pseudo-stéréophonie.

En cas de troubles de l’audition, de l’équilibre, consultez votre médecin ORL. Il est le seul à pouvoir vous conseiller ou vous traiter.

Définition, physiopathologie et classification du neurinome de l’acoustique (schwannome vestibulaire)

Le neurinome de l’acoustique, ou schwannome vestibulaire, est une tumeur intracrânienne bénigne développée aux dépens des cellules de Schwann de la gaine du nerf cochléo-vestibulaire (VIIIe nerf crânien). Il s’agit le plus souvent d’une tumeur unilatérale non cancéreuse à croissance lente, siégeant dans le conduit auditif interne (CAI) et l’angle pontocérébelleux (APC). Histologiquement, on retrouve classiquement des zones denses de cellules fusiformes (Antoni A) et des zones myxoïdes plus lâches (Antoni B). La zone d’implantation est typiquement la transition entre le système nerveux central et périphérique au niveau du porus acousticus (zone d’Obersteiner-Redlich). La tumeur s’étend ensuite du CAI vers l’APC, pouvant comprimer les structures adjacentes (tronc cérébral, cervelet) en l’absence de prise en charge.

Bien que souvent nommé neurinome de l’acoustique, ce tumorat touche en réalité plus fréquemment la branche vestibulaire du VIII (d’où la dénomination schwannome vestibulaire) et non les fibres cochléaires elles-mêmes (Vestibular schwannoma | Radiology Reference Article | Radiopaedia.org). Dans ~90% des cas, la tumeur naît de la division inférieure du nerf vestibulaire. Rarement (moins de 5%), elle peut se développer à partir du nerf cochléaire, ou présenter des formes ectopiques (intracochléaires, intralabyrinthiques).

Sur le plan physiopathologique, la croissance lente du schwannome vestibulaire entraîne une compression progressive des fibres nerveuses. La perte d’inhibition de contact due à la prolifération anormale des cellules de Schwann entraîne une dymyélinisation segmentaire des fibres cochléovestibulaires, expliquant les symptômes auditifs et vestibulaires. La tumeur est encapsulée, bien délimitée et n’est pas infiltrante. Sa croissance peut s’étendre au-delà du CAI dans l’APC : la compression du tronc cérébral et du cervelet ne survient qu’aux stades avancés, vu l’évolution généralement indolente sur plusieurs années.

Plusieurs systèmes de classification coexistent pour décrire l’extension et guider la prise en charge. La plus utilisée en pratique ORL et neurochirurgicale est la classification de Koos :

  • Koos I : tumeur intracanalaire pure (confinée au CAI).
  • Koos II : tumeur présentant une protrusion dans la citerne de l’APC sans contact avec le tronc cérébral.
  • Koos III : tumeur occupant l’APC et venant au contact du tronc cérébral (mais sans le comprimer).
  • Koos IV : tumeur volumineuse comprimant le tronc cérébral et déplaçant les nerfs crâniens adjacents.

Une autre classification couramment utilisée est celle de Hannover (stades T1 à T4, semblable à Koos). Par ailleurs, l’évaluation de l’audition pré-thérapeutique utilise souvent la classification AAO-HNS (Classes A à D, basée sur l’audiométrie tonale et la discrimination vocale) ou la classification de Gardner-Robertson (grades I à V) afin de définir le caractère serviceable ou non de l’audition. Ces classifications auditives orientent le choix thérapeutique (par exemple, possibilité d’une chirurgie conservatrice de l’audition ou non).

Enfin, on distingue les formes sporadiques unilatérales (≈95% des cas) des formes génétiques liées à la neurofibromatose de type 2 (NF2) où les schwannomes vestibulaires sont bilatéraux, associés à une mutation du gène NF2 (merlin) sur le chromosome 22q12 (Vestibular schwannoma | Radiology Reference Article | Radiopaedia.org).

Causes et facteurs de risque du neurinome de l’acoustique

La plupart des schwannomes vestibulaires sont sporadiques, sans facteur déclenchant clairement identifié. A ce jour, il n’existe pas de cause environnementale directe avérée. Certaines hypothèses ont été explorées : par exemple, l’exposition aux radiations ionisantes à haute dose (radiothérapie céphalique dans l’enfance) augmente le risque de tumeurs des gaines nerveuses, y compris de neurinomes de l’acoustique. En revanche, les craintes initiales concernant les radiations des téléphones portables n’ont pas été confirmées : les études épidémiologiques n’ont pas mis en évidence de lien de causalité direct entre l’usage du portable et le développement d’un schwannome vestibulaire.

Le principal facteur de risque établi est génétique : la présence d’une neurofibromatose de type 2 (NF2). La NF2 est une maladie autosomique dominante rare due à une mutation du gène NF2 (chromosome 22) codant la méritine (ou schwannomine). Elle entraîne typiquement des schwannomes vestibulaires bilatéraux (signature quasi pathognomonique), associés à d’autres tumeurs intracrâniennes (méningiomes multiples, épendymomes). Moins de 5% de l’ensemble des schwannomes vestibulaires sont liés à la NF2, mais chez ces patients la maladie se manifeste plus précocement (3e décennie) et suit un cours évolutif particulier (lésions bilatérales, souvent multiples et récidivantes).

D’autres facteurs ont été suggérés sans preuve définitive : une prédisposition familiale en l’absence de NF2 est exceptionnelle, et aucune exposition professionnelle n’a été confirmée. On note un légé léger excès féminin dans la plupart des séries, ce qui a fait évoquer un rôle hormonal (grossesse parfois associée à une croissance tumorale accélérée, mécanisme mal compris). Enfin, la ni une exposition chronique au bruit, ni les antécédents de traumatisme crânien, ne sont reconnus comme facteurs de risque directs, même s’ils peuvent amener à réaliser des examens qui révèlent incidemment la tumeur.

Épidémiologie

Le schwannome vestibulaire représente ~8–10% de l’ensemble des tumeurs intracrâniennes chez l’adulte et 80–90% des lésions de l’angle pontocérébelleux (les autres lésions de cette région étant principalement les méningiomes ~5–10%, puis les kystes épidermoïdes, etc.). Son incidence a semblé augmenter ces dernières décennies, en partie du fait de diagnostics plus fréquents par imagerie. Historiquement estimée autour de 1 cas pour 100 000 personnes par an, l’incidence annuelle est aujourd’hui évaluée entre 2 et 5 cas par 100 000 habitants. Par exemple, une revue systématique récente rapportait une incidence moyenne de ~2,2/100 000, tandis que certaines séries contemporaines scandinaves ou britanniques trouvent jusqu’à 3–4/100 000/an, reflet du dépistage accru des petites tumeurs asymptomatiques. En France, on diagnostique de l’ordre de quelques centaines de nouveaux cas par an.

La prévalence du schwannome vestibulaire dans la population générale est difficile à établir, mais des études IRM systématiques ont retrouvé des incidentalomes (schwannomes asymptomatiques découverts fortuitement) chez environ 0,02–0,13% des sujets (soit jusqu’à 1 personne sur 1000) – ce qui corrobore l’augmentation des diagnostics d’apparence épidémiologique. Ces tumeurs peuvent demeurer longtemps cliniquement silencieuses.

Le profil démographique typique est celui d’un adulte d’âge moyen : le diagnostic est le plus fréquent entre 50 et 60 ans (âge moyen ~50 ans). La majorité des cas sporadiques surviennent entre 40 et 60 ans, bien que des patients plus jeunes ou plus âgés ne soient pas rares. Les formes liées à la NF2 se déclarent plus précocement (souvent avant 30 ans). Les schwannomes vestibulaires sont exceptionnels chez l’enfant en dehors de la NF2. On note un léger prédominance féminine (aux alentours de 55–60% de femmes dans certaines cohortes), bien que ce biais soit modeste. Aucune prédilection ethnique claire n’est rapportée.

La distribution bilatérale est l’apanage de la NF2 : tout neurinome de l’acoustique bilatéral doit faire rechercher une NF2 (mutation constitutionnelle). La prévalence de la NF2 est d’environ 1/25 000, ce qui explique la rareté des formes bilatérales (<5% des neurinomes de l’acoustique).

Symptômes cliniques typiques et atypiques

Le neurinome de l’acoustique se manifeste classiquement par un syndrome cochléovestibulaire unilatéral progressif. Cependant, la présentation clinique peut être insidieuse et variée. Les symptômes otologiques prédominent aux stades initiaux, tandis que des signes neurologiques tronculaires ou d’hypertension intracrânienne n’apparaissent qu’en cas de tumeur volumineuse.

  • Atteinte auditive (cochléaire) : Le symptôme le plus fréquent révélateur est une hypoacousie de perception unilatérale (surdité neurosensorielle) progressive ( Signs and Symptoms of Acoustic Neuroma at Initial Presentation: An Exploratory Analysis – PMC ). Environ 80–95% des patients présentent une baisse auditive sur l’oreille du côté de la tumeur. Il s’agit typiquement d’une perte tonale dans les hautes fréquences, d’installation lentement progressive sur des mois ou années. Elle passe parfois inaperçue au début, le patient pouvant compenser en milieu calme ou attribuer la gêne à des causes bénignes (cérumen, otite…). Souvent, c’est la difficulté à suivre les conversations en milieu bruyant ou au téléphone sur l’oreille atteinte qui alerte. Un signe caractéristique est la dégradation de la discrimination vocale disproportionnée par rapport au déficit tonal pur (atteinte rétrocochléaire). Dans de rares cas, la surdité peut être brutale : ~5–10% des neurinomes de l’acoustique se révèlent par une surdité brusque (installation en quelques heures/jours), parfois régressive spontanément en quelques semaines. Toute surdité brusque unilatérale inexpliquée doit donc faire évoquer ce diagnostic et conduire à une IRM, même en cas de récupération partielle. L’acouphène unilatéral accompagne fréquemment la surdité (dans ~60–80% des cas). Il s’agit le plus souvent d’un acouphène tonal aigu (sifflement) constant ou intermittent. Parfois l’acouphène peut constituer le motif principal de consultation, y compris avec une audition conservée (dans ~6% des cas il est le symptôme isolé au début) ( Signs and Symptoms of Acoustic Neuroma at Initial Presentation: An Exploratory Analysis – PMC ). La présence d’un acouphène asymétrique ou unilatéral persistant doit amener à explorer un schwannome vestibulaire, contrairement aux acouphènes bilatéraux symétriques où la probabilité d’un neurinome est quasi nulle. D’autres manifestations auditives peuvent être rapportées : hyperacousie (intolérance aux sons forts), diplacousie (distorsion sonore), ou sensation de plénitude auriculaire ipsilatérale.
  • Atteinte vestibulaire : Contrairement à la maladie de Ménière, le neurinome de l’acoustique provoque rarement des crises vertigineuses rotatoires franches. L’atteinte vestibulaire se traduit plutôt par une instabilité posturale chronique à bas bruit : sensation d’être déséquilibré, surtout dans l’obscurité ou lors de mouvements rapides de la tête, éventuellement majorée par la fatigue. En effet, la perte vestibulaire est généralement partiellement compensée centralement du fait de sa progression lente. Un vertige rotatoire aigu n’est présent qu’exceptionnellement au début (dans ~3–5% des cas) ( Signs and Symptoms of Acoustic Neuroma at Initial Presentation: An Exploratory Analysis – PMC ), possiblement lors d’une micro-hémorragie intratumorale ou d’une décompensation soudaine. Certains patients décrivent des oscillopsies (flou visuel lors des mouvements de tête) traduisant une déficience du réflexe vestibulo-oculaire. Le nystagmus spontané est inconstant (visible dans ~40–50% des cas, le plus souvent unidirectionnel vers le côté sain). À un stade avancé, lorsque la tumeur atteint une grande taille, des troubles de l’équilibre à la marche (ataxie cérébelleuse) peuvent apparaître, témoignant d’une compression du pédoncule cérébelleux.
  • Atteinte du nerf facial (VII) : Elle est le plus souvent minime et tardive dans le schwannome vestibulaire sporadique. En effet, le nerf facial est contigu à la tumeur dans le CAI, mais généralement comprimé sans dysfonction majeure tant que la tumeur est de petite taille. Des parésies faciales périphériques cliniquement visibles sont rares avant le stade III–IV de Koos. Néanmoins, un examen attentif peut parfois retrouver des signes subtils d’atteinte faciale : fatigabilité musculaire, légère asymétrie du sourire, hyperlacrymation réflexe (signe du crocodile), ou synkinesis (larmoiement à la mastication par régénération aberrante). Paradoxalement, certains patients présentent des spasmes faciaux (tics) ou des fasciculations, probablement par irritation du VII, ou encore une hypoesthésie de la zone de Ramsay Hunt (conque auriculaire) par atteinte de la petite collatérale sensitive du VII. Lorsqu’une parésie faciale sévère est d’emblée présente, il faut évoquer un diagnostic différentiel (schwannome facial primaire, autre lésion) car ce n’est pas typique d’un neurinome vestibulaire d’emblée.
  • Atteinte du nerf trijumeau (V) : Un engourdissement facial du même côté (hypoesthésie ou paresthésies dans le territoire V2 ou V3) peut survenir pour des tumeurs de taille intermédiaire à grande, par compression du nerf trijumeau au niveau du ganglion de Gasser. La diminution ou l’abolition du réflexe cornéen du côté atteint est un signe objectif important, parfois détecté à l’examen neurologique avant que le patient ne se plaigne de troubles sensitifs. Plus rarement, des douleurs névralgiques atypiques de la face peuvent être décrites, simulant une névralgie trigéminale essentielle – mais la survenue de douleurs franches est plutôt évocatrice d’un méningiome de l’angle (le schwannome vestibulaire donne classiquement une hypoesthésie indolore).
  • Atteinte des autres nerfs crâniens : Les paires crâniennes inférieures IX et X peuvent être atteintes par compression en cas de tumeur géante (stade Koos IV). On peut alors observer des troubles du voile du palais (voix nasonnée, fausses routes par paralysie vélopariétale), une dysphonie et des troubles de déglutition par atteinte du X. Ces signes traduisent généralement une lésion volumineuse occupant l’angle ponto-cérébelleux de façon majeure. Le nerf abducens (VI) peut aussi être comprimé (donnant une diplopie horizontale). Ces manifestations restent exceptionnelles dans le neurinome de l’acoustique sporadique et témoignent d’une tumeur à un stade avancé, souvent > 4 cm.
  • Signes d’hypertension intracrânienne : Un neurinome vestibulaire peut, s’il atteint une grande taille, comprimer le tronc cérébral et obturer partiellement le 4e ventricule, entraînant une hydrocéphalie obstructive. Le tableau associe alors des céphalées intracrâniennes diffuses, des nausées/vomissements en jet, des troubles de la vigilance ou de l’humeur, et des œdèmes papillaires au fond d’œil. Ce tableau d’HTIC est rare dans les pays développés car les tumeurs sont habituellement diagnostiquées avant d’atteindre une taille critique. Il peut toutefois se rencontrer dans certains cas négligés ou d’évolution rapide, et constitue une urgence neurochirurgicale (risque de compression bulbaire engageant le pronostic vital).

En résumé, le tableau typique est : hypoacousie de perception unilatérale progressive associée à des acouphènes et un déséquilibre chronique, chez un adulte d’âge moyen. Les formes atypiques incluent : les présentations par surdité brusque, par acouphène isolé, par vertiges paroxystiques (rares), ou encore la découverte incidente d’une petite tumeur asymptomatique lors d’un examen IRM pour une autre raison (environ 2% des diagnostics dans certaines séries). Devant tout symptôme cochléovestibulaire unilatéral inexpliqué (même transitoire), le clinicien ORL doit évoquer ce diagnostic et réaliser les investigations nécessaires.

Diagnostics différentiels audio-vestibulaires et neurologiques (tableau)

Les symptômes du schwannome vestibulaire, surtout à un stade initial, peuvent mimer d’autres pathologies oto-neurologiques. Il est capital d’écarter les diagnostics différentiels suivants :

  • Pathologies de l’oreille interne avec surdité et vertiges : notamment la maladie de Ménière, la névrite vestibulaire, les surdités brusques idiopathiques, la fistule périlymphatique, ou encore un schwannome intralabyrinthique. Celles-ci se distinguent habituellement par la nature épisodique ou aiguë des symptômes, le caractère fluctuant de l’audition (Ménière), ou le contexte clinique (surdité brusque isolée sans masse à l’IRM, etc.). Par exemple, la maladie de Ménière provoque des crises vertigineuses itératives avec acouphènes et plénitude auriculaire, alors qu’un neurinome provoque plutôt une instabilité chronique et des acouphènes continus. De même, une surdité brusque idiopathique se déclare en <72h et peut récupérer partiellement, ce qui n’est pas le cas d’une surdité progressive par neurinome.
  • Névralgie cochléovestibulaire vasculaire : un conflit vasculo-nerveux (boucle de l’artère cérébelleuse antérieure comprimant le VIII) peut causer acouphènes pulsatiles, vertiges positionnels ou hypoacousie. L’IRM peut montrer un vaisseau en conflit dans le CAI, sans masse tumorale. Ce diagnostic reste d’élimination et controversé.
  • Atteintes centrales démyélinisantes : la sclérose en plaques peut occasionnellement toucher le nerf VIII (névrite du VIII), entraînant une baisse auditive unilatérale et des vertiges. Toutefois, le tableau s’intègre dans un contexte de dissémination spatio-temporelle (antécédents de névrite optique, de myélite partielle, etc.) et l’IRM encéphalique révèle des lésions démyélinisantes multifocales sans prise de contraste nodulaire dans le CAI. L’âge d’apparition (30 ans) est plus jeune que pour un neurinome, et l’évolution par poussées-remissions est évocatrice.
  • Autres tumeurs de l’angle pontocérébelleux : le diagnostic différentiel radiologique principal est le méningiome de l’angle pontocérébelleux. Le méningiome de l’APC peut provoquer une présentation similaire (hypoacousie unilatérale progressive, acouphènes, déséquilibre). On le distingue par l’imagerie : il prend en masse la base du crâne avec un « tail dural » (prise de contraste en queue de comète le long de la dure-mère) et peut envelopper les structures neurovasculaires plutôt que les repousser. Le nerf V est souvent plus touché cliniquement dans le méningiome (névralgies du trijumeau), et l’audition parfois mieux préservée initialement. Un kyste épidermoïde dans l’angle peut également simuler un schwannome (symptômes similaires). L’IRM le différencie facilement : l’épidermoïde n’est pas rehaussé par le gadolinium, il a un aspect kystique en hypersignal T2 et une restriction de diffusion. Citons aussi les plus rares schwannomes d’autres nerfs crâniens (schwannome du facial, du glossopharyngien…) qui peuvent se manifester par des signes proches si volumineux. Un schwannome trigéminal par exemple peut s’étendre jusqu’à l’APC et provoquer une hypoacousie par effet de masse, mais l’atteinte sensitive faciale est au premier plan. L’anévrisme de l’artère basilaire ou de l’AICA est à distinguer (tumeur pulsatile, souffle audible, aspect vasculaire à l’imagerie). Enfin, des métastases méningées au CAI ou carcinomatoses leptoméningées peuvent exceptionnellement imiter un petit schwannome (chez un patient cancéreux), de même qu’un cholestéatome pétreux érodant l’oreille interne.

Le tableau ci-dessous récapitule les principaux diagnostics différentiels audiovestibulaires et neurologiques du neurinome de l’acoustique, et les éléments permettant de les distinguer :

Diagnostic différentiel Caractéristiques audiovestibulaires (oreille interne) Atteinte neurologique (nerfs crâniens/central) Éléments distinctifs clés
Maladie de Ménière (hydrops endolymphatique) Surdité de perception unilatérale fluctuante, souvent avec acouphènes et plénitude auriculaire, crises aiguës de vertige rotatoire de 20 min à quelques heures, évolution par poussées Pas de déficit neuro central durable (nystagmus horizonto-rotatoire en crise), pas d’atteinte du V ou VII Caractère épisodique et réversible des symptômes, aggravation par le sel/stress, évolution en plateau entre les crises, IRM normale (pas de masse)
Névrite vestibulaire (neurolabyrinthite) Vertige rotatoire aigu majeur prolongé (jours) avec nystagmus unidirectionnel, ataxie vestibulaire importante, sans surdité associée (atteinte vestibulaire isolée) Pas d’atteinte des nerfs crâniens (hormis éventuellement nystagmus), audition normale Contexte post-infectieux (souvent viral), début brutal, absence de symptôme auditif, compensation progressive en quelques semaines, IRM normale
Surdité brusque idiopathique Perte auditive neurosensorielle unilatérale ≥30 dB sur <72h, souvent accompagnée d’acouphènes +/- légers vertiges; audiogramme plat ou abrupt, pas de progression secondaire Pas de signe neurologique focal (examen neuro normal) Installation soudaine, parfois au réveil, étiologie inconnue; urgence thérapeutique (corticoïdes), récupération spontanée partielle dans ~50% cas; IRM normale (élimine neurinome)
Sclérose en plaques (atteinte du VIII) Baisse d’audition unilatérale +/- vertiges selon la lésion, pouvant mimer un AEP (atteinte rétrocochléaire dissociée) Autres signes disséminés (névrite optique, troubles moteurs/sensitifs centraux), survenue en poussées Sujet plus jeune (20-40 ans), antécédents neurologiques, lésions démyélinisantes à l’IRM cérébrale (hypersignaux T2 périventriculaires), bandes oligoclonales au LCR, pas de masse au CAI
Méningiome de l’angle pontocérébelleux Hypoacousie neurosensorielle unilatérale possible (moins fréquente ou plus tardive que VS), acouphènes inconstants, vertiges rares Atteinte du V souvent plus marquée (névralgies faciales ou hypoesthésie cornéenne précoce), atteinte du VII possible mais tardive; signes d’HTIC tardifs si volumineux IRM : lésion extra-axiale plaque insérée largement sur la dure-mère pétreuse (« tail » dural), rehaussement homogène intense, parfois calcifications; nerf auditif souvent “englouti” dans la tumeur. Croissance généralement un peu plus rapide. Pas d’extension intracanal (ou élargissement diffus du CAI)
Kyste épidermoïde de l’angle Surdité neurosensorielle légère possible, vertiges et instabilité modérés (évolution très lente) Atteinte du V possible (hypoesthésie), atteinte du VII très rare; peut causer irritation méningée (raideur de nuque) IRM : masse non rehaussée, aspect kystique hypodense en T1, hypersignal en T2 FLAIR, avec restriction de diffusion (diagnostique); tumeur congénitale à croissance lente.
Autre schwannome crânien (ex: trigéminal) Parfois hypoacousie légère par effet de masse (si gros schwannome trigéminé atteignant l’APC) mais le plus souvent audition normale; vertige absent Déficit du nerf impliqué en premier (ex : névralgie du V ou anesthésie faciale dans schwannome trigéminal, ± diplopie dans schwannome VI), atteinte cochléovestibulaire secondaire si extension tumorale IRM : masse rehaussée atteignant le foramen du nerf correspondant (ex : cavum de Meckel élargi pour le V), trajet tumoral différent du CAI; signes cliniques focaux non cohérents avec une atteinte isolée du VIII.
Conflit vasculaire AICA-VIII Acouphènes pulsatiles unilatéraux ± hypoacousie neurosensorielle, vertiges positionnels non constants, tableau variable Aucun déficit neuro permanent; éventuellement nystagmus positionnel, pas d’atteinte V ou VII Angio-IRM : contact étroit entre l’artère cérébelleuse antéro-inférieure (AICA) et le nerf VIII au niveau du CAI, sans masse; diagnostic d’élimination (traitement médical ou décompression vasculaire possible si invalidant).
Autre cause de perte auditive unilatérale (non rétrocochléaire) Toute cause cochléaire (ex : otospongiose cochléaire, trauma acoustique unilatéral) peut simuler une surdité de perception unilat, mais en général sans vertige ni signes centraux Aucune (atteinte strictement cochléaire) Otoscopie et audiométrie évocatrices d’une atteinte de l’oreille interne ou moyenne (ex: otospongiose = déficit de transmission + perception), exam neuro normal, IRM élimine un processus de l’angle.

NB : L’IRM avec gadolinium permet habituellement de trancher entre ces diagnostics en visualisant ou non une lésion du CAI/APC. Un schwannome vestibulaire intracanal de petite taille doit être distingué d’images trompeuses comme un rehaussement vasculaire du fond du CAI (veine du canal auditif interne) ou le ganglion de Scarpa proéminent, mais ces faux positifs sont rares et reconnus par des radiologues expérimentés.

Modalités diagnostiques

Le diagnostic positif de neurinome de l’acoustique repose sur un faisceau d’arguments audiologiques et surtout sur l’imagerie par résonance magnétique.

  • Audiométrie tonale et vocale : L’audiogramme montre typiquement une surdité de perception unilatérale ou asymétrique, souvent prédominante sur les fréquences aiguës (tonalités > 2 kHz). L’atteinte peut être légère à profonde selon la taille et l’évolution de la tumeur. Un élément caractéristique est la discrimination vocale diminuée de façon marquée sur l’oreille atteinte, souvent sans rapport strict avec la courbe tonale (phénomène de roll-over possible à l’échelle supraliminaire, indiquant une atteinte rétrocochléaire). Par exemple, une perte tonale de 30 dB peut s’accompagner d’une discrimination <50%, ce qui est évocateur (alors qu’une atteinte endocochléaire isolée conserve en général une bonne compréhension pour ce degré de perte). Les tests au diapason (Weber, Rinne) orientent vers une surdité de perception unilatérale (Weber latéralisé côté sain, Rinne positif sur l’oreille atteinte). L’appréciation de la qualité auditive permet de classer le patient selon l’échelle AAO-HNS : classe A (audition dite utile : perte tonale moyenne ≤30 dB et score vocal ≥70%), B (≤50 dB, ≥50%), C (≤70 dB, ≥50%) ou D (>70 dB ou <50% de discrimination), correspondant aux grades I à V de Gardner-Robertson. Cette stratification est utilisée en pratique pour décider de tenter une préservation de l’audition (généralement si classe A ou B). Par ailleurs, une diplacousie (distorsion de la tonalité perçue) ou un recrutement négatif (paradoxalement, moindre gêne pour les sons forts du côté atteint) sont des signes subjectifs parfois rapportés.
  • Potentiels évoqués auditifs du tronc cérébral (PEA) : Les PEA (ou ABR, Auditory Brainstem Responses) évaluent la conduction nerveuse auditive. Un neurinome entraîne classiquement un allongement des latences des ondes I–III et I–V du côté atteint, traduisant le ralentissement de conduction sur le nerf auditif. On recherche en particulier un allongement de la latence de l’onde V ou un allongement de l’intervalle interaural I–V > 0,2 ms. La sensibilité des PEA pour détecter un neurinome est bonne (70–95% selon la taille tumorale) mais n’est pas absolue. Les petites tumeurs intracanalaires (< 5 mm) peuvent donner des PEA normaux (fausses négatives) et, à l’inverse, des surdités endocochléaires peuvent perturber les PEA (limite de spécificité). Ainsi, les PEA ne sont plus le test de référence pour le dépistage des schwannomes : une IRM est requise en cas de forte suspicion clinique, même si les PEA sont normaux. Néanmoins, les PEA gardent un intérêt quand l’IRM est contre-indiquée (pacemaker non compatible) ou en dépistage initial de masse. Un test de déchirure vocale (Speech discrimination rollover) et un test de Fowler (recrutement) complètent parfois le bilan audio.
  • Imagerie cérébrale – IRM : L’IRM avec injection de gadolinium est l’examen de référence pour confirmer le diagnostic. Elle visualise la tumeur, même de très petite taille (quelques millimètres). Sur les séquences T1 avec gadolinium, le neurinome apparaît comme une lésion prenant un contraste intense dans le CAI et éventuellement l’angle pontocérébelleux. Sur les séquences T2, il est en hypersignal hétérogène (parfois avec un aspect en cible : hyposignal central, hypersignal périphérique). Les tumeurs volumineuses peuvent montrer des zones de dégénérescence kystique. L’IRM doit comporter des coupes fines centrées sur les rochers (idéalement séquences tridimensionnelles type gradient echo T1 gadolinium ou T2 FIESTA/CISS) pour bien visualiser le CAI. Un élargissement du porus acoustique (pore du CAI) est souvent visible sur les coupes en fenêtre osseuse ou en scanner, mais ce signe n’est ni constant ni spécifique. En pratique, toute surdité neurosensorielle unilatérale inexpliquée ou asymétrie audiométrique significative doit conduire à réaliser une IRM cérébrale centrée sur les conduits auditifs internes, afin d’éliminer un neurinome de l’acoustique (recommandation partagée par toutes les sociétés savantes). Lorsque l’IRM est contre-indiquée, on peut réaliser un scanner avec myélographie ou à défaut un scanner injecté haute résolution des rochers, qui peuvent montrer une image indirecte (comblement du CAI, élargissement) mais avec une sensibilité inférieure.
  • Explorations vestibulaires : Elles font partie du bilan, aidant à objectiver l’atteinte du nerf vestibulaire. La plus classique est l’épreuve calorique bitermale (test de Barany), qui met en évidence un déficit vestibulaire unilatéral dans ~60–80% des cas de schwannome vestibulaire. Typiquement, on retrouve une hyporéflexie calorique ou aréflexie du côté de la lésion (réponse canalaire horizontale diminuée de >25% par rapport au côté sain, unilateral weakness) dans une large proportion de patients, proportion qui augmente avec la taille tumorale. Des études rapportent un nystagmus calorique unilatéral dans ~66% des VS, avec une corrélation entre l’importance du déficit calorique et la taille de la tumeur. Les tests impulsionnels tête-à-vide (vHIT) explorant les canaux semicirculaires à haute fréquence peuvent être normaux dans les petits neurinomes bien compensés, mais deviennent pathologiques pour les tumeurs plus grandes (gain vestibulaire diminué, saccades de rattrapage). Les potentiels évoqués myogéniques (VEMP) sont utiles pour évaluer la fonction otolithique : un schwannome atteignant de préférence la branche inférieure du nerf vestibulaire abolit souvent le cVEMP (réponse du saccule au son, via le nerf vestibulaire inférieur) alors que l’oVEMP (utricule, branche supérieure) peut être préservé, ce qui oriente sur la branche nerveuse concernée. Globalement, ces tests confirment l’atteinte vestibulaire périphérique unilatérale, sans en déterminer l’étiologie ; ils ne dispensent pas de l’IRM. En revanche, ils sont utiles en suivi post-thérapeutique (compensation vestibulaire).
  • Autres examens : Un examen neurologique ORL complet doit être réalisé, incluant l’étude des paires crâniennes V, VII, IX–X (recherche d’un déficit cornéen, d’une asymétrie faciale, d’un réflexe stapédien anormal, etc.). L’évaluation oto-rhinolaryngologique élimine d’autres causes (tympan normal, pas de fistule à la compression tragale, etc.). Une acoumétrie (diapasons) ou un test de Gacek (instillation d’eau glacée dans l’oreille pour provoquer un nystagmus du côté sain si vestibule intact du côté atteint) sont parfois utilisés. En cas de diagnostic confirmé, le bilan pré-thérapeutique comprend souvent une IRM cérébrale complète (pour éliminer d’autres tumeurs synchrones, en particulier si NF2), une audiométrie dans l’autre oreille (état comparatif) et un bilan d’équilibre pré-rééducatif. Un scanner des rochers est souvent réalisé en complément avant chirurgie (pour étudier l’anatomie osseuse du mastoïde, du labyrinthe et du trajet du nerf facial).

Synthèse diagnostique : En pratique, l’IRM cérébrale avec gadolinium est l’examen clé pour affirmer le diagnostic de schwannome vestibulaire. Celle-ci est indiquée devant toute suspicion clinique (hypoacousie unilatérale, acouphène unilatéral, etc.), et confirmera la présence d’une lésion du CAI/APC dans la quasi-totalité des cas. Les tests audiovestibulaires orientent en amont vers une atteinte rétrocochléaire unilatérale (donnant l’alerte) et permettent de documenter le déficit fonctionnel initial pour le suivi. L’IRM précise la taille tumorale (exprimée souvent en diamètre maximal extraméatal, ou volume), la situation (intracanal, extension en angle, refoulement du tronc cérébral, etc.), et permet de classer selon Koos. Ces éléments guideront la stratégie thérapeutique.

Options thérapeutiques

Le traitement du neurinome de l’acoustique doit être individualisé en fonction de la taille tumorale, de la gêne fonctionnelle (audition, équilibre), de l’âge et des comorbidités du patient, ainsi que de ses préférences. Classiquement, trois attitudes sont possibles :

  1. Surveillance active (abstention contrôlée).
  2. Traitement chirurgical (chirurgie de résection tumorale).
  3. Radiothérapie stéréotaxique (principalement radiochirurgie en dose unique ou radiothérapie en doses fractionnées).

Chacune de ces options présente des indications, avantages et inconvénients spécifiques, détaillés ci-dessous. De plus, chez les patients porteurs de NF2 avec schwannomes bilatéraux, des traitements médicaux adjuvants (ex. bévacizumab anti-VEGF) peuvent être discutés dans des cas particuliers pour tenter de stabiliser la croissance tumorale et préserver l’audition, mais ceci dépasse le cadre des formes sporadiques.

Surveillance active (abstention surveillance)

La surveillance – aussi appelée “wait and scan” – consiste à ne pas traiter immédiatement la tumeur, mais à la surveiller par imagerie et tests audiométriques réguliers. Cette approche est indiquée typiquement pour les petits schwannomes asymptomatiques ou paucisymptomatiques : par exemple, une tumeur intracanalire (Koos I) découverte fortuitement, chez un patient avec une audition encore bonne et un déséquilibre minimal. Elle est également souvent proposée chez les patients âgés (>70 ans) ou fragiles, chez qui l’évolution lente de la lésion pourrait ne jamais menacer le pronostic fonctionnel ou vital sur l’horizon de vie.

La surveillance comporte en pratique une IRM de référence à 6 mois post-diagnostic, puis des IRM annuelles durant quelques années. Si la lésion reste stable sur 2–3 ans, l’intervalle peut être allongé (IRM tous les 2 ans, puis espacements). Un suivi audiométrique concomitant est réalisé (tous les 6–12 mois). L’objectif est de détecter une évolution volumétrique ou fonctionnelle justifiant alors un traitement actif secondaire.

Les avantages de l’abstention-surveillance sont d’éviter un traitement invasif inutile pour les tumeurs indolentes. Environ 30 à 70% des schwannomes vestibulaires ne montrent pas de croissance significative sur 5 ans (les chiffres varient selon les séries, typiquement ~50% de tumeurs stables à 5 ans). En moyenne, les tumeurs évolutives croissent d’environ 2 à 3 mm par an en diamètre maximal. Il est cependant difficile de prédire dès le diagnostic quelles tumeurs croîtront : aucun facteur clinique n’est suffisamment fiable (même si certains suggèrent qu’un patient plus jeune aurait plus de risque évolutif). La surveillance permet également de préserver immédiatement l’audition lorsqu’elle est encore bonne, et d’éviter les risques (chirurgicaux ou radiques) tant qu’aucun signe d’évolution n’apparaît. Des études de qualité de vie montrent d’ailleurs qu’à moyen terme, les patients surveillés rapportent souvent une qualité de vie supérieure à ceux traités d’emblée (en l’absence de progression, biais de sélection).

Les inconvénients majeurs sont le risque de progression tumorale : ~50% des patients initialement surveillés nécessiteront un traitement actif dans les 5 ans. Durant la phase de surveillance, une perte auditive progressive peut survenir malgré tout (même sans croissance à l’IRM, l’audition peut se détériorer, possiblement par ischémie du nerf ou évolution microkystique). Ainsi, un patient jeune avec une tumeur même petite risque de voir son audition se dégrader avec le temps, compromettant une stratégie ultérieure de préservation auditive. Par ailleurs, la surveillance impose une compliance rigoureuse aux IRM de suivi : une rupture de suivi pourrait aboutir à une croissance non détectée et à une tumeur plus difficile à traiter ensuite. Enfin, l’incertitude liée à la présence d’une tumeur peut générer de l’anxiété chez certains patients durant l’observation.

Les critères de basculement d’une surveillance vers un traitement actif incluent : croissance objective de la tumeur (généralement >2 mm d’augmentation du diamètre maximal entre deux IRM successives), perte auditive significative ou apparition de nouveaux symptômes (ex. atteinte trigéminale, vertiges invalidants). Dans ces cas, une intervention (chirurgie ou radiochirurgie) sera proposée.

En résumé, la surveillance est recommandée pour les petits VS asymptomatiques chez des patients bien informés et capables d’un suivi (recommandation de classe III). Elle nécessite une information claire du patient sur les risques et implique une concertation multidisciplinaire. Des protocoles spécifiques (ex. reculer l’IRM à 18 mois si aucune croissance à 3 ans) peuvent être adaptés selon les centres. Notons que même en cas de surveillance prolongée, un patient reste éligible secondairement à la radiothérapie stéréotaxique ou à la chirurgie si l’évolution le requiert, bien que les chances de préserver l’audition ou le nerf facial puissent diminuer avec la croissance tumorale.

Traitement chirurgical (chirurgie d’exérèse)

La chirurgie est le traitement historique du neurinome de l’acoustique. Elle consiste à retirer la tumeur soit en totalité (exérèse complète) soit subtotale si nécessaire, par une approche microchirurgicale au niveau de la base du crâne. L’objectif est d’éliminer la masse tumorale afin de prévenir la progression et de soulager toute compression cérébrale, tout en préservant au maximum les fonctions nerveuses (faciale, cochléaire) et en évitant les complications.

La décision chirurgicale s’impose en général pour les tumeurs volumineuses ou évolutives : une lésion de grande taille (ex. Koos IV > 30 mm) avec effet de masse sur le tronc cérébral constitue une indication formelle d’exérèse, car la chirurgie est alors le seul moyen de lever la compression potentiellement mortelle. De même, une tumeur de taille intermédiaire (15–30 mm) chez un patient jeune sera le plus souvent proposée à la chirurgie, surtout si l’audition est déjà compromise, afin d’obtenir une guérison définitive. Les indications chirurgicales classiques incluent : tumeur >~20 mm, atteinte du tronc cérébral ou hydrocéphalie, patient < ~60 ans (sauf contre-indication), ou croissance rapide avérée. Parfois, la chirurgie est choisie d’emblée pour de plus petites tumeurs si le souhait est d’enlever la lésion “en une fois” (par exemple, certains patients préfèrent l’exérèse à la surveillance ou radiothérapie).

La prise en charge est idéalement effectuée par une équipe multidisciplinaire spécialisée (neurochirurgien et ORL oto-neurochirurgien opérant en binôme). L’intervention se déroule sous anesthésie générale, avec neuromonitoring peropératoire (monitorage en continu du nerf facial notamment). La durée opératoire varie (4 à 8 heures typiquement). Il existe plusieurs voies d’abord chirurgicales principales :

  • Voie translabyrinthique : accès à travers l’os temporal en passant par le labyrinthe postérieur (destruction de l’oreille interne). Cette voie expose le CAI en sacrifiant d’emblée l’audition du côté atteint (on traverse la cochlée et les canaux semi-circulaires). Elle offre un excellent contrôle de l’angle pontocérébelleux pour les tumeurs de toutes tailles, sans nécessité de rétracter le cerveau (on aborde directement l’APC par la pyramide pétreuse). Elle est particulièrement indiquée pour les tumeurs > 15 mm chez les patients sans audition fonctionnelle préopératoire (classe C ou D), ou pour les tumeurs entièrement intracanalaires chez un patient déjà sourd de cette oreille. Avantage : exposition anatomique large du nerf facial à sa sortie du tronc cérébral, permettant un bon taux de préservation du facial. Inconvénient : perte auditive totale inévitable, risque de fuite de LCR par l’oreille (nécessité d’obturer avec de la graisse).
  • Voie rétrosigmoïdienne (ou sous-occipitale latérale) : accès par craniotomie derrière le sinus sigmoïde, à la face postérieure du rocher. On atteint l’APC en contournant le cervelet (qui est rétracté), sans traverser l’oreille interne. Cette voie permet potentiellement de préserver l’audition, puisque le labyrinthe n’est pas détruit. Elle est indiquée surtout pour les tumeurs de taille petite à moyenne (< ~30 mm) chez des patients avec une audition encore utile (classe A ou B) et désireux de la conserver, ou pour certaines tumeurs médianes de l’angle. Pour les tumeurs > 30 mm, elle reste utilisée mais l’audition est presque toujours perdue du fait de la compression vasculo-nerveuse préexistante. Avantage : possibilité de préserver l’oreille interne et donc l’audition si les conditions sont favorables (petite tumeur, bon pronostic), vision panoramique du nerf cochléovestibulaire depuis son émergence. Inconvénient : espace de travail plus réduit dans le CAI (angle de vision moins direct pour la portion intrameatale), risque de traction sur le cervelet (céphalées post-opératoires fréquentes), et risque (faible) de complication de la position assise si utilisée (embolie gazeuse).
  • Voie de la fosse moyenne (ou sus-pétreuse) : accès par craniotomie temporale au-dessus de l’oreille interne, permettant d’ouvrir le toit du CAI par au-dessus. Utilisée quasi exclusivement pour les petits neurinomes intracanalaires (Koos I) ou légèrement extraméataux (≤ 1-1,5 cm) chez des patients avec très bonne audition à préserver. Elle offre un angle d’attaque direct sur la tumeur dans le CAI, avec une chance de préserver les structures cochléaires et le nerf facial en les repoussant délicatement. C’est une technique réservée à des équipes très entraînées. Avantage : meilleures chances de préserver l’audition pour les tumeurs intracanalaires (taux de préservation auditive rapportés de l’ordre de 50–70% dans les petites tumeurs). Inconvénient : champ étroit (difficile au-delà de 15 mm de tumeur), risque de complications temporales (épilepsie, atteinte du lobe temporal), technique plus délicate.

Le choix de la voie dépend de nombreux facteurs : taille et extension de la tumeur, audition préopératoire, expérience du chirurgien et préférence du patient informé. Par exemple, une tumeur de 8 mm chez un patient jeune avec audition classe A pourra être adressée par une voie retrosigmoïdienne ou fosse moyenne pour tenter de conserver l’audition. Une tumeur de 25 mm avec audition nulle sera plutôt abordée en translabyrinthique pour maximiser l’exérèse en toute sécurité pour le facial.

Lors de la chirurgie, le chirurgien résèque la tumeur généralement en la « débulkant » (aspiration progressive du centre tumoral) puis en disséquant les plans de clivage autour du nerf facial et du tronc cérébral. Un monitoring électrophysiologique continu du nerf facial est effectué tout au long de l’intervention (potentiels évoqués moteurs ou stimulation directe) pour alerter en cas de stress sur le nerf. Si la tumeur adhère intimement au nerf facial, l’équipe peut décider de laisser un petit résidu tumoral (exérèse subtotale) pour ne pas léser le nerf. Ce reliquat pourra éventuellement être traité secondairement par radiothérapie stéréotaxique. L’objectif principal est d’éviter une paralysie faciale complète. En fin d’intervention, le chirurgien referme en colmatant bien le CAI et l’oreille interne (si voie translabyrinthique) avec un greffon de graisse abdominale ou un autre matériau, afin de prévenir les fuites de liquide cérébro-spinal. La dure-mère est refermée étanche. Une dérivation lombaire temporaire est parfois mise en place si risque de fuite.

Les suites opératoires immédiates comportent souvent des vertiges importants les premiers jours (déséquilibre majeur par perte vestibulaire aiguë), nécessitant une aide à la marche et une rééducation vestibulaire précoce. Une surveillance en unité neurochirurgicale s’impose (24–48h en soins intensifs typiquement) pour surveiller l’état de vigilance, la fonction des paires crâniennes (évaluation du visage, réflexe cornéen, déglutition) et d’éventuelles complications. La durée d’hospitalisation varie de 5 à 10 jours en moyenne.

Les avantages de la chirurgie : c’est le seul traitement permettant une élimination complète immédiate de la tumeur (lorsque l’exérèse est totale), apportant une guérison définitive dans la majorité des cas. Cela soulage aussi la compression cérébrale si présente, ce que la radiothérapie ne fait pas. La chirurgie fournit en outre une confirmation histologique du diagnostic (examen anatomopathologique de la pièce opératoire), important dans de rares cas (par exemple, si c’était un méningiome inattendu ou un schwannome malin – bien que très improbable). Enfin, l’exérèse supprime l’effet de masse et rend possible, le cas échéant, la pose d’un implant auditif (cochlÉaire ou tronc cérébral) plus tard si la surdité est bilatérale, ou d’un implant de ancrage osseux (BAHA) pour compenser la surdité unilatérale.

Les inconvénients/risques de la chirurgie : c’est une procédure invasive avec les risques chirurgicaux inhérents. Le principal risque est la paralysie faciale post-opératoire, par atteinte du nerf facial. Même avec monitorage et technique microchirurgicale, le nerf facial peut être contusionné ou étiré. Le risque de paralysie faciale définitive (House-Brackmann grade V–VI) est faible pour les petites tumeurs (<5% des cas si <1 cm), mais augmente avec la taille tumorale (jusqu’à 20–30% pour les grosses tumeurs >3 cm). Dans les grandes séries, pour les tumeurs ≥ 3 cm, seulement ~27–58% des patients récupèrent une fonction faciale normale ou quasi-normale (HB I–II), alors que pour les tumeurs < 1,5 cm ce taux dépasse 90%. Les chirurgiens s’efforcent de maintenir le nerf intact ; en cas de section accidentelle, une anastomose hypoglosso-faciale ou autre technique de réparation peut être réalisée secondairement, mais le résultat fonctionnel est médiocre. On explique au patient que même sans section, une paralysie faciale transitoire est fréquente (HB III–IV) et peut mettre des semaines à régresser (la majorité s’améliorent en HB I–II en quelques mois). Une rééducation faciale (orthophonie motrice) est proposée en post-opératoire si atteinte.

Le deuxième inconvénient est la perte auditive. En cas de voie translabyrinthique, la surdité de l’oreille opérée est totale et irréversible (mais souvent l’audition était déjà faible). Pour les approches conservatrices (rétrosigmoïde/fosse moyenne), malgré les efforts de préservation, environ la moitié des patients perdent leur audition utile pendant ou après l’opération, surtout si la tumeur touche le nerf cochléaire ou son irrigation. Les chances de conserver une audition fonctionnelle à long terme après chirurgie pour un neurinome de petite taille sont de l’ordre de 50–70% dans les meilleures séries, mais chutent pour des tumeurs plus grandes ou si l’audition préopératoire est déjà diminuée. La chirurgie n’améliore jamais l’audition (au mieux elle la préserve).

D’autres risques chirurgicaux incluent : la fuite de liquide céphalo-rachidien (LCR) par la plaie ou par la trompe d’Eustache (risque ~5%), qui peut nécessiter des ponctions lombaires ou une reprise chirurgicale pour étanchéifier. Si la fuite de LCR persiste, il y a un risque de méningite post-opératoire qu’il faut prévenir (antibioprophylaxie si brèche, vaccination anti-pneumocoque préconisée dans certains centres). Un hématome cérébelleux ou de la loge chirurgicale est rare (<2–3%) mais possible, justifiant la surveillance en soins intensifs immédiate. Les infections de site opératoire (abcès, empyème) sont exceptionnelles. Des céphalées occipitales ou temporales sont fréquentes dans les semaines suivant la craniotomie (hydrocéphalie syndrome de basse pression possible si fuite LCR). Des troubles de l’équilibre importants sont quasi constants initialement (abolition de la fonction vestibulaire du côté opéré), mais s’améliorent généralement avec la rééducation vestibulaire et l’adaptation centrale. Enfin, on peut citer le risque anesthésique général (thrombose veineuse, etc.) et, très rare, le risque vital (hémorragie massive, engagement cérébral) qui dans les mains expertes est <0,5%.

En cas d’exérèse incomplète volontaire, un résidu tumoral millimétrique peut être laissé en place adhérent au nerf facial. Ce résidu sera surveillé par IRM. S’il présente une re-croissance lors du suivi, une radiochirurgie complémentaire sera généralement proposée pour le contrôler. Cette stratégie combinée “débulking chirurgical + gamma knife secondaire” est fréquente pour les tumeurs volumineuses afin de maximiser la préservation du facial.

En somme, la chirurgie offre la solution curative la plus radicale, au prix d’un risque non négligeable sur le nerf facial et l’audition. Les résultats fonctionnels sont excellents pour les petites tumeurs (avec >95% de fonction faciale normale si <10 mm, et ~50% de préservation auditive utile si audition initiale parfaite), mais plus la tumeur est grosse, plus les séquelles sont probables. La tendance actuelle est de réserver la chirurgie aux tumeurs symptomatiques, volumineuses ou évolutives, et d’en discuter l’intérêt face aux alternatives moins invasives dans les autres cas.

Radiothérapie stéréotaxique : radiochirurgie (Gamma Knife, CyberKnife) et radiothérapie fractionnée

La radiothérapie stéréotaxique consiste à administrer une irradiation ciblée et conformationnelle sur la tumeur, de façon à stopper sa croissance. Elle peut être délivrée en une seule séance (radiochirurgie au sens strict) ou en plusieurs fractions (radiothérapie stéréotaxique fractionnée), selon la technique et la taille tumorale. Cette modalité a profondément modifié la prise en charge des schwannomes vestibulaires depuis les années 1990, en offrant une alternative non invasive à la chirurgie pour les tumeurs de petite et moyenne taille.

Les deux outils principaux sont le Gamma Knife et le CyberKnife :

  • Gamma Knife : système de radiochirurgie utilisant 192 sources de Cobalt-60, convergeant sur la cible tumorale. Le traitement est administré en une seule séance (dose unique élevée, typiquement ~12 Gy au pourtour tumoral pour un neurinome). Le patient est sous anesthésie locale (ou sédation) et une cadre de stéréotaxie est fixé sur son crâne pour assurer la précision millimétrique. Le Gamma Knife est particulièrement indiqué pour les petits schwannomes vestibulaires (généralement < 25–30 mm de diamètre). Il permet un taux de contrôle tumoral élevé, de l’ordre de 90–95% à 5 ans (c’est-à-dire absence de progression volumétrique) ( EANO guideline on the diagnosis and treatment of vestibular schwannoma – PMC ). Le traitement est ambulatoire (hospitalisation de jour). Il n’a pas pour but de faire disparaître la tumeur mais d’arrêter son évolution : la tumeur irradieé va entrer en quiescence (arrêt de croissance), pouvant éventuellement légèrement réduire de taille avec le temps (nécrose, cavitation kystique).
  • CyberKnife : accélérateur linéaire monté sur un bras robotisé, permettant d’administrer la radiothérapie de façon stéréotaxique fractionnée (ou parfois unique). L’avantage du CyberKnife est de ne pas nécessiter de cadre rigide fixé au crâne : un masque thermoformé et un guidage par imagerie permettent de cibler la tumeur. La dose totale peut être délivrée en plusieurs fractions (par ex 3 à 5 sessions) pour mieux épargner les tissus sains sensibles. Le CyberKnife et d’autres systèmes de LINAC stéréotaxiques obtiennent des résultats comparables au Gamma Knife en termes de contrôle tumoral. La fractionnation légère (ex : 3 fractions de 7 Gy) est souvent choisie pour des tumeurs un peu plus grandes ou proches du tronc cérébral, afin de réduire le risque d’effets secondaires (l’évidence sur le bénéfice audiologique de la fractionnation reste discutée en l’absence d’études comparatives randomisées).
  • Radiothérapie conformationnelle fractionnée : Pour les tumeurs plus volumineuses, ou en cas de contraintes dosimétriques, une radiothérapie classique en plusieurs dizaines de séances (25–30 séances sur 5–6 semaines) peut être effectuée. On parle de FSRT (fractionated stereotactic radiotherapy). Cette modalité est choisie si la tumeur est trop grosse pour une dose unique (>3 cm, compression du tronc), ou si le patient ne peut tolérer une chirurgie. Le contrôle tumoral à long terme est également d’environ 90%. Cependant, cette option mobilise le patient sur de nombreuses séances et n’est pas forcément supérieure en terme d’effets indésirables (certains suggèrent qu’elle pourrait mieux préserver l’audition en répartissant la dose, mais les données ne sont pas tranchées).

Les indications de la radiothérapie stéréotaxique regroupent en général les schwannomes vestibulaires de petite ou moyenne taille (généralement Koos I à III, < 30 mm) chez des patients adultes, notamment si l’audition est encore bonne et qu’on souhaite la préserver, ou chez des patients refusant la chirurgie/inopérables. C’est souvent le choix privilégié pour les patients d’âge intermédiaire ou avancé (~60–70 ans) présentant une tumeur de taille modérée, car elle évite les risques chirurgicaux tout en offrant d’excellents taux de contrôle. On évite en revanche la radiothérapie si la tumeur est volumineuse avec effet de masse notable (risque d’œdème post-irradiation aggravant la compression). Une tumeur > 3 cm adhérente au tronc cérébral est une contre-indication relative à la radiochirurgie en dose unique (préférence alors pour une chirurgie de décompression ou une radiothérapie en plusieurs fractions). Par ailleurs, la présence d’une hypertension intracrânienne ou d’une extension tumorale kystique massive militent pour la chirurgie (la radiothérapie n’apportant pas de décompression immédiate).

Chez le sujet jeune (<~40 ans) avec petite tumeur, la radiothérapie est discutée : certains argumentent qu’à long terme (>20 ans), l’effet des radiations est inconnu (risque théorique de transformation maligne extrêmement rare du schwannome ou induction d’un méningiome radio-induit). Cependant, aucune étude n’a montré à ce jour de sur-risque significatif de néoplasie radio-induite après Gamma Knife pour VS ; c’est donc une option valable y compris chez des patients relativement jeunes, si bien informés.

Les avantages de la radiothérapie stéréotaxique : le traitement est non invasif, sans anesthésie générale (sauf légère sédation éventuellement). Il n’y a pas de cicatrice, pas de séjour en réanimation. La morbidité immédiate est très faible : pas de paralysie faciale immédiate, pas de risque vital. Le patient reprend ses activités rapidement. Le taux de contrôle tumoral est excellent (~90–95% de non-progression à 5–10 ans) ( EANO guideline on the diagnosis and treatment of vestibular schwannoma – PMC ), équivalent à celui de la chirurgie pour les petites tumeurs. La préservation du nerf facial avec la radiothérapie est de l’ordre de 98–100% (très rares atteintes du facial aux doses actuelles <13 Gy). La préservation de l’audition est également favorisée à court terme : par exemple, pour une audition classe A au départ, on estime que ~75–100% des patients gardent une audition utile à 2 ans après radiochirurgie, et encore ~50–75% à 5 ans. À 10 ans post-radiosurgie, environ 25–50% conservent une audition fonctionnelle. Ces chiffres sont comparables aux résultats de la chirurgie pour les petites tumeurs, voire légèrement supérieurs initialement, la différence se comblant sur le long terme du fait du déclin auditif progressif lié à l’irradiation. En d’autres termes, la radiothérapie permet souvent de retarder la perte auditive, sans la garantir à long terme.

Les inconvénients de la radiothérapie : d’abord, la tumeur n’est pas retirée – elle reste en place, pouvant conserver ses effets compressifs s’ils existaient (on ne peut pas traiter par radiothérapie une tumeur qui comprime déjà dangereusement le cerveau, il faut d’abord la réséquer chirurgicalement). Ensuite, la destruction tumorale par irradiation est progressive : la tumeur met des mois à montrer des signes de nécrose ou de stabilisation. Parfois, on observe même une augmentation transitoire de la taille tumorale dans les 6–12 mois post-radiosurgie (phénomène de pseudoprogression liée à l’œdème et à la réaction inflammatoire). Cela peut inquiéter, mais n’est pas synonyme d’échec – on gère par une simple surveillance rapprochée.

En termes d’effets secondaires, la radiothérapie peut entraîner : une aggravation ou survenue d’une perte auditive progressive dans les années qui suivent (par dégénérescence du nerf cochléaire irradié). Environ 30–50% des patients traités par radiochirurgie pour VS voient leur audition se détériorer de ≥ 1 classe audiométrique dans les 5 ans post-traitement (ce qui rejoint l’évolution naturelle ou post-chirurgicale) ( EANO guideline on the diagnosis and treatment of vestibular schwannoma – PMC ). Des acouphènes peuvent persister ou apparaître. Sur le plan vestibulaire, on a noté dans certaines études qu’environ 20–50% des patients rapportent des symptômes vestibulaires transitoires (déséquilibre, vertiges) dans les semaines ou mois suivant l’irradiation, possiblement liés à une démyélinisation progressive du nerf irradié. Ces symptômes sont habituellement moins aigus qu’après chirurgie et peuvent être pris en charge par de la rééducation vestibulaire.

Les complications neurologiques graves de la radiothérapie sont rares aux doses employées : le risque de paralysie faciale tardive est <2% (typiquement <1% avec des doses ≤13 Gy). Le risque d’atteinte du nerf trijumeau (engourdissement facial) est un peu plus élevé, notamment aux anciennes doses (15 Gy) on rapportait ~5% de dysesthésies du V. Avec les protocoles actuels (12 Gy), ce risque est tombé sous 2%. Un syndrome cérébelleux tardif par radionécrose cérébelleuse est extrêmement rare. En somme, la tolérance est excellente pour les tumeurs de taille adéquate.

Un autre inconvénient est que la radiothérapie complique quelque peu la chirurgie ultérieure si elle devait être nécessaire : opérer un schwannome qui a été irradié expose à un plan de clivage plus fibreux, donc un risque facial accru (multiplié par ~2). Inversement, traiter par radiochirurgie un reliquat après chirurgie est tout à fait faisable, avec un risque facial bien moindre que de réopérer.

La radiothérapie stéréotaxique est contre-indiquée en cas de doute diagnostique sur la nature (on ne radiotraitera pas sans certitude qu’il s’agit d’un VS bénin), sauf exception. Elle l’est également en cas de tumeur évolutive volumineuse > 3–3,5 cm obstruant le IVe ventricule, du fait du risque d’hydrocéphalie aiguë par œdème (ces cas relèvent de la chirurgie). La présence d’une NF2 avec multiples tumeurs peut poser problème : les schwannomes NF2 répondent un peu moins bien à la radiothérapie (tendance à la récidive), et le patient risque de cumuler les irradiations. Néanmoins, la radiothérapie reste une option dans la NF2 pour traiter un neurinome dominant, ou des récidives postopératoires, tout en surveillant les autres.

En résumé : la radiochirurgie (Gamma Knife en tête) est un traitement très efficace et sûr pour les neurinomes de l’acoustique < 3 cm. Elle offre un excellent contrôle tumoral, avec un faible risque de morbidité immédiate. Elle est maintenant largement utilisée en première intention chez de nombreux patients, notamment ceux d’âge moyen/âgé, ou ceux avec tumeur modérée et souhaitant éviter la chirurgie. La décision thérapeutique doit être prise en RCP en comparant cette option avec la chirurgie au cas par cas.

Tableau comparatif des modalités thérapeutiques

Le tableau suivant compare les différentes stratégies (surveillance, chirurgie, radiochirurgie, radiothérapie fractionnée) en termes d’indications, avantages, inconvénients et contre-indications :

Modalité thérapeutique Indications préférentielles Avantages principaux Inconvénients principaux Risques fréquents Contre-indications principales
Surveillance active (IRM annuelle) – Tumeur petite (Koos I-II)- Absence de symptômes significatifs- Patients âgés/comorbidités- Audition excellente – Non invasif- Évite risques immédiats- Bonne qualité de vie initiale- Préserve temporairement l’audition si stable – Risque de croissance (~50 % à 5 ans)- Dégradation possible de l’audition sans croissance tumorale- Anxiété du patient – Perte auditive progressive – Patient non fiable pour le suivi- Tumeur volumineuse symptomatique (Koos IV)
Chirurgie : voie translabyrinthique – Tumeur moyenne à volumineuse (>15 mm)- Audition déjà perdue ou non fonctionnelle- Nécessité d’exérèse totale rapide (compression cérébrale) – Contrôle tumoral complet immédiat (exérèse totale)- Faible taux de récidive- Bonne visualisation du nerf facial – Perte auditive définitive immédiate- Intervention invasive, séjour hospitalier 5-10 jours- Convalescence prolongée – Vertiges postopératoires importants- Fuite de LCR (~5%)- Atteinte du nerf facial selon taille – Tumeurs petites avec bonne audition (alternative conservatrice préférable)- Risque chirurgical élevé (patients très âgés/comorbidités sévères)
Chirurgie : voie rétrosigmoïde – Tumeur petite/moyenne (<30 mm) accessible par APC- Souhait de préserver audition et nerf facial- Patient jeune avec audition préservée – Possibilité de préservation auditive (50–70% petite taille)- Bon contrôle tumoral immédiat- Nerf facial souvent bien préservé – Perte auditive dans ~50 % des cas malgré tentative de préservation- Accès difficile pour les petites tumeurs intracanalaires profondes- Risque modéré de céphalées postopératoires – Paralysie faciale temporaire (fréquente)- Vertiges postopératoires aigus- Fuite LCR (~5%) – Tumeur volumineuse compressive (>35 mm, Koos IV)- Absence d’audition utile initiale (privilégier voie translabyrinthique)
Chirurgie : voie fosse moyenne – Petite tumeur strictement intracanalaire ou Koos II limité- Audition classe A (excellente)- Patient jeune motivé à conserver l’audition – Meilleure possibilité de préservation auditive (60-70%) pour très petites tumeurs- Accès direct à la tumeur dans CAI – Champ opératoire étroit- Risque d’atteinte du lobe temporal (épilepsie rare)- Intervention délicate réservée aux centres experts – Vertiges postopératoires modérés- Paralysie faciale rare mais possible- Fuite LCR possible – Tumeurs >15 mm- Audition déjà médiocre (classe C ou D)- Patients très âgés/comorbidités
Radiothérapie stéréotaxique : Gamma Knife (dose unique) – Tumeur petite à moyenne (<25-30 mm)- Patients âgés ou non candidats chirurgicaux- Souhait de traitement non invasif avec préservation auditive initiale – Non invasif, ambulatoire, récupération rapide- Contrôle tumoral ~90-95 % à 10 ans- Risque facial très faible (~1%)- Bonne préservation auditive initiale (75-100% à 2 ans) – Tumeur reste en place (absence d’analyse histologique)- Dégradation auditive progressive sur 5-10 ans (~50%)- Effet retardé sur la tumeur (stabilisation lente sur plusieurs mois)- Difficulté d’une chirurgie éventuelle ultérieure – Vertiges transitoires (30-50%)- Déclin auditif progressif tardif (50% à 5-10 ans)- Neuropathie trigéminale rare (1-2%) – Tumeurs volumineuses (≥ 30-35 mm, Koos IV avec compression sévère)- Syndrome d’hypertension intracrânienne/hydrocéphalie- Diagnostic incertain (nécessité histologique)
Radiothérapie stéréotaxique fractionnée (CyberKnife) – Tumeurs intermédiaires (25-35 mm)- Proximité tronc cérébral nécessitant fractionnement- Patients refusant chirurgie – Non invasif- Évite les effets secondaires aigus de la radiochirurgie en dose unique- Contrôle tumoral ~90 % à 5-10 ans- Adaptée à des tumeurs un peu plus volumineuses – Nombreuses séances nécessaires (3-5, voire jusqu’à 25-30)- Coût et contrainte logistique supérieure- Pas de supériorité clairement démontrée sur la préservation auditive à long terme par rapport au Gamma Knife – Vertiges transitoires modérés- Dégradation progressive de l’audition comparable au Gamma Knife- Risque facial très faible mais non nul (<2%) – Très grosses tumeurs (>35 mm)- Hydrocéphalie aiguë ou compression sévère (nécessité chirurgie immédiate)- Diagnostic incertain

Remarque : dans certains centres, on parle de radiochirurgie même pour une délivrance en 3 à 5 fractions (hypofractionnée), la frontière n’est pas absolue. L’important est la précision stéréotaxique (≥ leur de 1 mm) et la conformation de la dose à la forme tumorale.

Résumé pratique pour la décision ORL :

  • Tumeurs petites asymptomatiques : Surveillance active.
  • Tumeurs petites symptomatiques ou évolutives (Koos I-II) : Gamma Knife préférable chez sujet ≥ 50 ans ; chirurgie conservatrice possible chez sujet jeune.
  • Tumeurs moyennes (Koos II-III) avec audition préservée : Gamma Knife ou chirurgie rétrosigmoïde selon âge, état général, et choix du patient.
  • Tumeurs volumineuses (Koos IV) ou auditivement perdues : Chirurgie (voie translabyrinthique) de préférence, radiothérapie fractionnée seulement si chirurgie impossible.

Ce tableau simplifie les scenarios : en pratique, le choix doit être adapté. Par exemple, un patient de 30 ans avec neurinome 8 mm et audition parfaite pourra légitimement choisir entre surveillance initiale ou chirurgie par fosse moyenne, alors qu’un patient de 65 ans avec neurinome 15 mm classe A d’audition sera plutôt orienté vers un Gamma Knife d’emblée.

Pronostic fonctionnel et vital selon les stratégies

Pronostic auditif

La préservation de l’audition est un enjeu central. Sans traitement, l’évolution naturelle tend vers une aggravation progressive de la surdité sur l’oreille atteinte (souvent jusqu’à la cophose en quelques années). Avec traitement, les résultats varient :

  • Chirurgie : si l’audition est déjà très atteinte (classe C ou D) préopératoire, la chirurgie (voie translabyrinthique par ex.) n’entraîne pas de changement subjectif (oreille déjà non fonctionnelle). Si l’audition est encore bonne (classe A/B) et que l’on tente de la préserver (voie retrosigmoïde ou F.M.), les chances de conserver une audition utile (classe A/B) immédiatement après la chirurgie sont de l’ordre de 50–70% pour les petites tumeurs < 1 cm. Après 5 ans, environ la moitié de ces patients conserveront une audition utilisable (beaucoup perdent quelques décibels ou de la discrimination avec le temps), et à 10 ans possiblement seulement ~25%. Ainsi, la chirurgie permet une préservation auditive à long terme dans une minorité de cas, même sélectionnés, car d’autres facteurs (dégénérescence progressive du nerf cochléaire, âge) interviennent. Pour les tumeurs > 15 mm, l’audition est presque toujours perdue. En cas de surdité unilatérale post-opératoire, le pronostic auditif général reste bon puisque l’autre oreille compense la compréhension. Des solutions de transmission du son contra-latérale (audioprothèse CROS, implant à conduction osseuse type BAHA) peuvent améliorer le confort en cas de cophose unilatérale, et chez les patients bilatéralement atteints (NF2), l’implant cochléaire (si le nerf cochléaire est intact de l’autre côté) ou l’implant du tronc cérébral (ABI) peuvent être envisagés dans des centres spécialisés.
  • Radiothérapie stéréotaxique : la conservation de l’audition est initialement meilleure qu’en chirurgie. Pour un patient avec classe A, on estime 75–100% probabilité de garder cette classe à 2 ans post-Gamma Knife, 50–75% à 5 ans, et 25–50% à 10 ans ( EANO guideline on the diagnosis and treatment of vestibular schwannoma – PMC ). La dégradation progressive sur 10 ans est notable mais correspond en partie à l’évolution naturelle. Si l’audition était moins bonne (classe B/C) au départ, les chances de la garder utile sont moindres. Au-delà de 10–15 ans, il n’y a pas assez de recul dans toutes les séries, mais on sait que certains finiront par perdre l’audition sur l’oreille traitée. Ainsi, la radiochirurgie retarde la perte auditive plus qu’elle ne l’empêche absolument. Néanmoins, chez des patients plus âgés, préserver 5–10 ans d’audition est un bénéfice significatif. Comparativement, la stratégie “observation puis traitement à progression” peut permettre de conserver l’audition sans risque immédiat ; cependant, les données montrent qu’en surveillance, ~50% des patients perdent l’audition fonctionnelle en 3–4 ans de suivi même sans traitement, ce qui est proche de l’évolution sous radiothérapie, d’où l’importance de discuter le bon timing du traitement pour maximiser la préservation auditive.
  • Surveillance : comme évoqué, tant que la tumeur n’évolue pas, l’audition peut rester stable. Néanmoins, environ la moitié des patients sous simple surveillance verront leur audition se détériorer significativement en quelques années, même sans croissance IRM. Si cela survient, le patient peut perdre l’opportunité d’un traitement conservateur. D’un autre côté, s’il reste stable, il aura conservé son audition sans intervention. C’est donc un pari bénéfice/risque qui doit être clairement présenté. Les recommandations actuelles suggèrent que chez un patient jeune avec schwannome vestibulaire et audition excellente, s’il est très attaché à préserver cette audition, on peut initialement surveiller tout en sachant qu’une radiothérapie précoce pourrait être proposée au premier signe de croissance, avant que l’audition ne se dégrade d’elle-même.

En pratique ORL, on considère qu’un patient ayant une surdité complète unilatérale a un handicap auditif modéré (gène dans le bruit, perte de la stéréophonie, risque sur localisation spatiale des sons, mais intelligibilité conservée grâce à l’autre oreille). Si l’autre oreille est normale, la vie quotidienne reste largement autonome. Le pronostic auditif global (binoculaire) est donc bon tant que l’oreille controlatérale va bien. Le risque principal concerne les patients NF2 qui peuvent perdre l’audition des deux côtés de manière séquentielle – pour eux, la préservation auditive ou l’implantation est cruciale pour éviter la surdité totale bilatérale.

Pronostic du nerf facial

La fonction du nerf facial (mimique) est un critère majeur de réussite du traitement, car une paralysie faciale constitue un handicap fonctionnel et esthétique important. Naturellement, sans traitement, un neurinome de l’acoustique sporadique aboutit rarement à une paralysie faciale spontanée (sauf cas tardifs extrêmes). Le risque provient donc surtout du traitement lui-même.

  • Après chirurgie : Grâce aux techniques actuelles, environ 90–95% des patients opérés pour un petit neurinome (<1,5 cm) conservent une fonction faciale normale ou quasi-normale (House-Brackmann I ou II). Pour les tumeurs moyennes (1,5–3 cm), ce taux de préservation du facial chute autour de 70–85%. Pour les grosses tumeurs (>3 cm), il peut tomber en dessous de 50%. Dans les approches translabyrinthiques ou retrosigmoïdiennes sur des tumeurs de taille modeste, les équipes expérimentées rapportent souvent 95–100% de HB I–II en post-opératoire immédiat, signifiant aucune paralysie notable. Toutefois, il n’est pas rare d’avoir une parésie transitoire (HB III ou IV) régressant en quelques semaines. À 1 an post-opératoire, le taux de récupération à HB I–II s’améliore encore (certains nerfs “étourdis” reprennent fonction). Par exemple, une série sur 151 patients traités principalement par voie retrosigmoïdienne indiquait 97% de fonction faciale HB ≤ II à terme. En revanche, pour des tumeurs géantes, comme noté, les résultats sont bien moins bons (parfois seule la fonction faciale partielle HB III–IV est obtenue).

Un aspect important est la paralysie faciale tardive : rarement, on observe une paralysie différée à quelques jours post-op malgré un nerf facial anatomiquement intact (palsy tardive). Cela est souvent dû à un œdème ou une ischémie du nerf dans son canal après la manipulation, ou parfois à une réactivation herpétique (phénomène de Melkersson). Ce type de paralysie différée touche ~5% des patients et a un pronostic de récupération excellent dans la majorité (retour à HB I–II en quelques semaines sous corticothérapie ± antiviraux).

En cas de paralysie faciale persistante (HB V–VI au-delà de 1 an), des procédures de réanimation faciale peuvent être proposées (anastomose nerveuse, greffe hypoglosso-faciale, plasties statiques pour paupière, etc.), mais les résultats restent partiels (mimique incomplète). Heureusement, ce cas de figure est devenu peu fréquent hors tumeurs volumineuses.

  • Après radiothérapie stéréotaxique : Le risque d’atteinte du nerf facial est très faible. Avec les protocoles actuels (12 Gy), on observe <1–2% de faiblesse faciale définitive. Dans de nombreux centres, ce risque est proche de zéro. Ainsi, >98% des patients conservent un nerf facial normal (HB I) post-radiochirurgie. Cela confère un avantage significatif de la radiothérapie sur la chirurgie concernant le nerf facial, surtout pour les tumeurs intermédiaires. À noter qu’une paralysie faciale retardée a été décrite dans de rares cas plusieurs mois après irradiation (probable microvascularite du nerf facial), mais c’est atypique. Dans l’ensemble, le pronostic du facial est excellent avec cette modalité. Même constat pour la radiothérapie fractionnée.
  • Surveillance : Par définition, elle n’altère pas le facial. Tant que la tumeur reste petite, le facial ne sera pas touché. Évidemment, si on laisse évoluer une tumeur jusqu’à un stade avancé, le risque de paralysie faciale compressive existe, mais ce scénario ne devrait pas survenir avec un suivi sérieux.

En synthèse, du point de vue du nerf facial, la meilleure stratégie est d’éviter l’intervention lourde tant que possible si le facial est intact. La radiochirurgie a un pronostic facial quasi équivalent à la surveillance, alors que la chirurgie comporte un risque proportionnel à la taille de la lésion. Ce facteur pèse dans la décision thérapeutique.

Équilibre et fonction vestibulaire

Quel que soit le traitement, le patient va se retrouver in fine avec une abolition de la fonction vestibulaire unilatérale (puisque soit le nerf est sectionné en chirurgie, soit il est détruit par la tumeur/irradiation sur le long terme). La différence porte sur la vitesse de la décompensation et la capacité de compensation centrale.

  • Après chirurgie : la perte vestibulaire est aiguë et complète (labyrinthe détruit ou nerf enlevé). Il s’ensuit un syndrome vestibulaire aigu harmonieux (vertige rotatoire, nystagmus spontané vers le côté sain, vomissements) dans les 24–48h post-opératoires, à intensité variable mais souvent marquée sur les tumeurs de moyenne taille. Ce syndrome régresse en partie en quelques jours grâce à la compensation centrale (le nystagmus s’estompe). Une rééducation vestibulaire active, débutée précocement (< 1 semaine), permet d’accélérer la compensation et d’améliorer la stabilité. Les études montrent que l’âge n’est pas un frein à la compensation dès lors que le patient est motivé et entraîné. À 6 semaines – 3 mois post-chirurgie, la majorité des patients n’ont plus de vertiges invalidants, seulement une gène dans les mouvements brusques ou dans l’obscurité. À 1 an, avec une bonne rééducation, beaucoup récupèrent un équilibre quasi normal au quotidien (le vestibule controlatéral supplée). Toutefois, environ 20–30% conservent des troubles de l’équilibre discrets (instabilité à la marche rapide, besoin de se tenir dans le noir), ce qui peut les gêner dans des activités spécifiques (sport, terrains accidentés). D’où l’importance d’un suivi kinésithérapique prolongé si nécessaire.
  • Après radiothérapie : La perte vestibulaire est progressive. Dans les mois qui suivent l’irradiation, le nerf vestibulaire traité subit une dégénérescence graduelle, permettant généralement une compensation centrale simultanée plus facile. Beaucoup de patients ne ressentent pas de vertige aigu, mais plutôt une majoration transitoire du déséquilibre ou quelques épisodes de faux vertige. Néanmoins, comme mentionné, jusqu’à ~46% des patients peuvent rapporter des symptômes vestibulaires aigus transitoires quelques mois après une radiochirurgie (ex : crise de vertige tardive vers 6 mois), surtout ceux qui avaient déjà des plaintes d’équilibre avant. Ces épisodes seraient liés à la nécrose progressive du nerf. Ils sont généralement gérables médicalement (vestibulosuppresseurs ponctuels) et rééducatifs. Au final, à 1 an post-radiothérapie, l’équilibre des patients est globalement similaire à ce qu’il serait après compensation chirurgicale. Aucune étude ne suggère que la radiothérapie préserve la fonction vestibulaire à long terme : la visée est tumorale, et la fonction du nerf irradié sera perdue aussi sûrement qu’avec la chirurgie, mais de façon plus étalée.
  • Surveillance : Tant que la tumeur reste stable, le déficit vestibulaire peut rester partiel et compensé. Certains patients en surveillance n’ont quasi pas de troubles d’équilibre initialement (fonction vestibulaire intacte ou partiellement intacte). Cependant, si la tumeur progresse, la fonction vestibulaire se détériore progressivement et peut se décompenser – potentiellement même avant un traitement. On recommande donc aussi la rééducation en cas de troubles pendant la surveillance, pour optimiser la compensation vestibulaire.

En conclusion, du point de vue de l’équilibre, le pronostic est en général favorable : le cerveau parvient à s’adapter à la perte d’un vestibule (via le processus de centralisation). La qualité de la compensation dépend de l’entraînement (d’où la place essentielle de la rééducation vestibulaire dans toutes les stratégies, précoce et systématique après chirurgie). Après un an, la plupart des patients mènent une vie normale sans vertiges, hormis de rares situations très spécifiques (par exemple, un danseur ou un funambule percevra la perte d’un vestibule plus qu’une personne sédentaire).

Pronostic vital

Le neurinome de l’acoustique étant une tumeur bénigne, le pronostic vital est excellent dans la quasi-totalité des cas pris en charge. La mortalité opératoire est très faible (<1%) dans les centres spécialisés. La radiothérapie stéréotaxique n’entraîne pas de mortalité directe. Le seul scénario mettant en jeu le pronostic vital serait une tumeur non traitée atteignant une taille critique avec engagement du tronc cérébral (risque de compression du bulbe ou d’hydrocéphalie aiguë) – situation devenue rarissime avec le suivi moderne.

Les études montrent que la survie spécifique des patients avec schwannome vestibulaire est identique à celle de la population générale, hors comorbidités intercurrentes. En d’autres termes, un patient avec neurinome de l’acoustique a l’espérance de vie de son groupe d’âge, dès lors que la tumeur est surveillée ou traitée comme il convient. Dans les formes NF2, le pronostic vital peut être influencé par les autres tumeurs associées (méningiomes mal placés, épendymomes médullaires, etc.), mais le schwannome vestibulaire en lui-même reste bénin.

Un aspect pronostic à mentionner est le risque de récidive ou de progression après traitement :

  • Après exérèse chirurgicale complète, le taux de récidive est bas (de l’ordre de 1–5%). La majorité des patients ne présenteront pas de repousse tumorale si l’ablation a été totale (vérifiée à l’IRM de contrôle à 3 mois). Néanmoins, un suivi IRM à long terme (tous les 5 ans) est souvent proposé même après 10 ans, car de rares repousses tardives ont été décrites (par prolifération de quelques cellules résiduelles). Dans les cas d’exérèse subtotale intentionnelle, le reliquat est souvent complémenté par radiochirurgie ; sinon, le risque de regrowth du résidu est plus élevé (~30–50% en 10 ans selon la taille du reliquat), nécessitant un traitement secondaire.
  • Après radiochirurgie, environ 5 à 10% des patients auront une progression de la tumeur à long terme. La définition de l’échec peut varier (croissance > 2 mm, ou nécessité d’une intervention ultérieure). Si la tumeur continue à croître malgré 1 ou 2 radiosurgeries, une chirurgie de rattrapage sera indiquée. Il n’est pas rare d’observer à l’IRM des modifications post-radiques (pseudo-kystes, prise de contraste hétérogène) ne correspondant pas à une vraie progression. Globalement, les courbes de contrôle tumoraux se stabilisent autour de 90% à 10–15 ans. Un suivi IRM à vie est préconisé après radiothérapie, initialement annuel pendant 5 ans, puis espace (tous les 2 ans puis 5 ans).
  • En surveillance active, le pronostic vital n’est pas engagé tant que le suivi est rigoureux. Si le patient développe des signes d’évolution menaçants (ex. hydrocéphalie), une intervention urgente sécurisera la situation (dérivation ou chirurgie). Un petit risque existe si un patient se perd de vue et reconsulte avec une tumeur géante après 10 ans, mais cela relève du défaut de suivi.

Enfin, l’impact sur la qualité de vie doit être souligné : plusieurs études montrent qu’à moyen terme, les patients surveillés ou traités par radiothérapie rapportent en général une meilleure qualité de vie que ceux traités par chirurgie lourde (du fait de l’absence de fatigue post-op, de séquelles moindres sur le facial ou l’ouïe). Toutefois, à long terme, les différences tendent à s’atténuer, et ce d’autant que la chirurgie est réalisée dans un centre expert minimisant les séquelles.

En conclusion, le pronostic d’un neurinome de l’acoustique est globalement excellent en termes de survie, et très bon en termes de fonction – en particulier avec les approches modernes (radiothérapie) pour les petites tumeurs. Le défi est de choisir la stratégie optimisant le maintien des fonctions auditives et faciales, et la qualité de vie, pour chaque patient.

Recommandations récentes et références officielles

La prise en charge des schwannomes vestibulaires doit se faire en accord avec les recommandations des sociétés savantes et après discussion multidisciplinaire. Voici les points clés des recommandations récentes :

  • Concertation multidisciplinaire (RCP) : En France, la Haute Autorité de Santé (HAS) a préconisé dès 2011 la mise en place de RCP Tumeurs de la base du crâne pour discuter chaque cas de neurinome de l’acoustique. Cela permet de croiser les avis d’ORL, de neurochirurgiens, de radiothérapeutes, d’audiologistes, afin de proposer au patient la meilleure stratégie (surveillance, radiochirurgie ou chirurgie) individualisée. La décision doit tenir compte des référentiels nationaux et de l’expérience du centre. La prise en charge dans des centres experts (CHU ou centre spécialisé en otoneurochirurgie) est recommandée pour optimiser les résultats, notamment chirurgicaux.
  • Information et choix éclairé du patient : Les recommandations insistent sur l’importance d’informer le patient de façon neutre sur les différentes options et leurs conséquences. L’American Academy of Otolaryngology – Head & Neck Surgery (AAO-HNS) souligne que le patient avec une petite tumeur et une bonne audition doit être conseillé sur les probabilités de préservation auditive selon chaque modalité, afin de faire un choix éclairé. Par exemple, pour une audition de classe A, l’AAO-HNS rapporte >75% de chance de garder l’audition à 2 ans avec une radiochirurgie, et un taux similaire immédiat post-chirurgie (mais qui peut décliner ensuite). Ce genre d’information chiffrée aide à la décision partagée.
  • Stratégie “Surveillance” : Les guidelines européennes (EANO 2019 – European Association of Neuro-Oncology) et américaines concordent pour valider la surveillance des schwannomes asymptomatiques. L’EANO précise qu’observer sans traitement est approprié pour les neurinomes incidents et asymptomatiques (recommandation de classe III). La condition est un suivi sérieux (risque si non compliance). L’EANO souligne qu’environ la moitié des tumeurs sont stables à 5 ans et que la perte d’audition peut survenir même sous surveillance, donc cela doit être pesé face aux traitements actifs.
  • Radiothérapie stéréotaxique : Les recommandations récentes confirment que la radiochirurgie est un traitement de choix pour les neurinomes < 3 cm. L’EANO 2019 indique que chez l’adulte d’âge moyen avec tumeur petite-moyenne, la radiochirurgie offre un meilleur contrôle tumoral que la simple observation (niveau de preuve II), parfois avec moins de perte auditive dans certaines études, bien que d’autres ne montrent pas de différence marquée en audition ou qualité de vie. Il est recommandé de la proposer aux patients qui ne nécessitent pas absolument une chirurgie. L’association Américaine de Neurochirurgie (CNS) a publié en 2018 des guidelines spécifiques où la radiochirurgie est fortement recommandée pour les tumeurs jusqu’à 2 cm surtout si l’audition est à préserver, en informant le patient des taux de conservation auditive (cf. supra) et de contrôle tumoral élevés. La dose typique conseillée est de 12–13 Gy au marge pour minimiser les risques, et la surveillance IRM post-GK est recommandée à 6 mois, 12 mois puis annuellement 5 ans.
  • Chirurgie : Les indications chirurgicales formelles sont rappelées : compression du tronc (Koos IV) ou effet de masse, tumeur kystique volumineuse, ou préférence du patient pour l’exérèse complète. L’EANO mentionne qu’en cas de volumineux VS Koos IV, la chirurgie est le traitement de première ligne (accord fort). Pour les tumeurs plus petites, la chirurgie est à discuter si on vise la guérison immédiate ou s’il y a des particularités (ex. forme kystique évolutive). L’AAO-HNS recommande d’évaluer l’audition pré-op et de choisir la voie chirurgicale en conséquence : ex, voie de la fosse moyenne si petite tumeur et audition classe A, etc. Par ailleurs, les guidelines du Congress of Neurological Surgeons (CNS) 2017–18 soulignent l’intérêt du monitoring facial et cochléaire peropératoire et de la technique la moins invasive possible pour préserver les nerfs crâniens.
  • Rééducation vestibulaire : La Société Française d’ORL (SFORL) a émis en 2023 des recommandations sur la prise en charge des vertiges, insistant sur la place de la rééducation vestibulaire après traitement d’un schwannome. Il est recommandé de mettre en place une rééducation vestibulaire précocement après chirurgie, quelle que soit la voie d’abord (Grade B). De même, une rééducation est conseillée chez les patients en surveillance ou avant traitement qui présentent un déséquilibre non compensé (Grade C). L’activité physique régulière est encouragée pour améliorer la plasticité cérébrale et la compensation. Ces mesures améliorent clairement l’équilibre post-thérapeutique et la qualité de vie.
  • Suivi à long terme : Les recommandations stipulent un suivi prolongé pour détecter les récidives ou complications tardives. L’AAO-HNS suggère un suivi audiométrique annuel et IRM à intervalles réguliers (typiquement : 6 mois, 12 mois, puis annuel x5 ans après traitement, puis tous les 2–5 ans). La SFORL recommande une IRM annuelle les premières années même après radiothérapie, puis tous les 2 ans si stable, puis tous les 5 ans à vie (consensus d’experts).
  • Cas particuliers NF2 : La prise en charge des neurinomes bilatéraux de la NF2 suit des recommandations spécifiques (HAS, 2018 – centres de référence maladie rare). On y trouve l’utilisation possible du bévacizumab (anti-VEGF) en injection systémique pour tenter de réduire la taille des schwannomes bilatéraux ou d’améliorer l’audition (étude publiée par Plotkin et al.), ainsi que la discussion d’un implant auditif du tronc cérébral (ABI) en cas de perte cochléaire bilatérale. La stratégie est souvent d’opérer le côté le plus symptomatique et de radiotraiter l’autre, ou vice-versa, afin d’échelonner les atteintes. Ces situations rares sont gérées dans des centres experts (Neurofibromatose).

En conclusion, la conduite à tenir actuelle pour un neurinome de l’acoustique se base sur ces principes guideliniers : diagnostic précoce par IRM devant toute surdité unilatérale inexpliquée, discussion collégiale individualisée, priorité à la préservation de la fonction (audition, facial) quand c’est possible, rééducation post-thérapeutique systématique, et suivi prolongé. Les sources officielles – HAS, SFORL, AAO-HNS, EANO, etc. – convergent globalement pour recommander une attitude nuancée et centrée sur le patient. La littérature récente confirme l’excellent pronostic de cette pathologie avec un traitement approprié, et l’importance de la collaboration entre ORL, neurochirurgiens et radiothérapeutes pour en optimiser la prise en charge.

Sources :

  • Veiga et al., Radiopaedia – Classification de Koos
  • Radeos – Fiche schwannome vestibulaire
  • Greene & Al-Dhahir, StatPearls 2023 – Épidémiologie et NF2
  • Foley et al. 2017 – Présentation clinique (80% hypoacousie) ( Signs and Symptoms of Acoustic Neuroma at Initial Presentation: An Exploratory Analysis – PMC )
  • Johns Hopkins Medicine – Symptômes (90% surdité unilat, 5% brusque)
  • EANO 2019 – Recommandations (observation, indications chirurgicales)
  • Medscape/AAO-HNS 2018 – Probabilités préservation auditive par modalité
  • Régis et al. – EANO 2019 (radiochirurgie, préservation audition >75% à 2 ans) ( EANO guideline on the diagnosis and treatment of vestibular schwannoma – PMC )
  • Bojrab et al. – cité par SFORL 2023 (46% vertiges transitoires post-GK)
  • HCL (CHU Lyon) – Fiche info patient (définition, chirurgie)
  • SFORL 2023 – Rééducation vestibulaire post-op (Grade B), surveillance (Grade C).