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Le Syndrome de Minor: causes, symptômes et traitements

Santé

Quelles sont les causes? Les causes du Syndrome de Minor

Le Syndrome de Minor, une maladie ORL identifiée relativement récemment, en 1998, par le chirurgien américain Lloyd Minor, est caractérisé par une anomalie structurelle dans l’oreille interne. Cette pathologie se manifeste par une déhiscence, c’est-à-dire une ouverture anormale, dans l’os qui enveloppe le canal semi-circulaire supérieur de l’oreille interne (l’os temporal). Ce canal est une composante essentielle du système vestibulaire, responsable du suivi oculaire des cibles visuelles. Selon le professeur Vincent Darrouzet, chef du service ORL au CHU de Bordeaux, un dysfonctionnement de ce système peut provoquer des vertiges rotatoires.

L’oreille, structurée avec deux fenêtres principales – la fenêtre ronde et la fenêtre ovale – joue un rôle crucial dans le processus auditif. Le son entre dans l’oreille, traverse le tympan et les osselets, et parvient à l’oreille interne via l’étrier qui s’ajuste de manière élastique à la fenêtre ovale. Il se propage ensuite dans la cochlée avant de ressortir par la fenêtre ronde, fermée par une membrane très fine. Le mouvement de l’étrier entraîne une dynamique de va-et-vient de cette membrane, essentielle à la création des vibrations nécessaires à l’audition. Cependant, la présence d’une déhiscence crée une “troisième fenêtre”, par laquelle une partie du son s’échappe, perturbant ainsi le processus auditif. Cette anomalie peut affecter une ou les deux oreilles (bilateralité).

Quels sont les symptômes? Les symptômes du Syndrome de Minor

Les symptômes du Syndrome de Minor peuvent être divisés en deux catégories : cochléaires et vestibulaires. L’un des symptômes cochléaires les plus notables est l’otophonie, qui se traduit par une perception exacerbée de sa propre voix, au point de gêner la parole. Des témoignages de patients, comme Justine et Stéphane, illustrent l’impact perturbateur de cette sensation, évoquant une fatigue intense et une modification de la qualité de vie, notamment en ce qui concerne la conversation et le chant. L’otophonie peut également amplifier anormalement les bruits internes du corps, une expérience troublante décrite par les patients. Anna, 35 ans, exprime la difficulté de communiquer cette expérience singulière, soulignant l’intensité des sensations et des bruits inhabituels ressentis.

  • Acouphène pulsatile

L’acouphène pulsatile est aussi un symptôme commun du syndrome de Minor. Le professeur Darrouzet explique que le cerveau et la méninge qui le recouvre ont un rythme pulsatile, similaire à celui du cœur. Dans le cas de cette maladie, la méninge, en contact avec les liquides de l’oreille interne via le canal supérieur, transmet cette pulsation au cerveau. Par conséquent, les patients perçoivent ces pulsations sous forme d’acouphènes pulsatile, qui imitent les battements du cœur. Cette expérience varie en intensité parmi presque tous les patients.

  • La surdité

Le syndrome ORL de Minor, également connu sous le nom de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur, peut conduire à une surdité, bien que ce ne soit pas systématiquement le cas pour tous les patients. La raison principale derrière cette perte auditive est liée à la structure anormale de l’oreille interne causée par le syndrome. Voici quelques éléments clés pour comprendre pourquoi cette condition peut entraîner une surdité :

  • Déhiscence Osseuse :

Le syndrome de Minor est caractérisé par une déhiscence, c’est-à-dire une ouverture ou une fine fissure dans l’os qui recouvre le canal semi-circulaire supérieur. Cette déhiscence crée une sorte de “troisième fenêtre” en plus des fenêtres ovale et ronde normales de l’oreille.

  • Fuite de l’Énergie Sonore :

Normalement, les sons sont transmis efficacement à travers l’oreille moyenne vers l’oreille interne. Cependant, en présence d’une déhiscence, une partie de l’énergie sonore peut s’échapper à travers cette “troisième fenêtre”. Cela perturbe la manière dont le son est traité et perçu, pouvant entraîner une diminution de l’audition ou une surdité.

  • Conduction Anormale des Sons :

La déhiscence peut également modifier la manière dont les sons sont conduits à l’intérieur de l’oreille. Les bruits internes du corps, comme ceux produits par la mastication ou même le mouvement des yeux, peuvent être anormalement amplifiés, tandis que les sons extérieurs peuvent être moins bien perçus, contribuant à la surdité.

  • Résonance Anormale :

La déhiscence peut causer une résonance anormale à l’intérieur de l’oreille interne. Cela peut non seulement affecter l’équilibre et provoquer des vertiges, mais aussi altérer la perception normale des sons, contribuant à une perte auditive.

Il est important de noter que l’impact du syndrome de Minor sur l’audition peut varier considérablement d’une personne à l’autre. Certains patients peuvent éprouver une perte auditive légère, tandis que d’autres peuvent subir une surdité plus significative.

  • Le phénomène de Tullio

Le phénomène de Tullio, observé dans le syndrome ORL de Minor, est une réaction inhabituelle et excessive de l’oreille interne à des sons spécifiques ou à des volumes sonores. Voici une explication détaillée de ce phénomène dans le contexte du syndrome de Minor :

    • Définition du Phénomène de Tullio :

Le phénomène de Tullio est caractérisé par l’induction de vertiges, de déséquilibre, et parfois de nystagmus (mouvements oculaires involontaires et rapides) en réponse à certains sons ou à des niveaux de pression sonore élevés. Ce phénomène a été initialement décrit par le médecin italien Pietro Tullio en 1929.
Relation avec la Déhiscence du Canal Semi-Circulaire Supérieur :

Dans le syndrome de Minor, le phénomène de Tullio est souvent attribué à la déhiscence osseuse du canal semi-circulaire supérieur. Cette déhiscence crée une fenêtre osseuse supplémentaire dans l’oreille interne, ce qui modifie la réponse de l’oreille aux stimuli sonores.

    • Mécanisme du Phénomène de Tullio :

Lorsque des sons forts ou certains types de sons atteignent l’oreille d’une personne souffrant de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur, la pression sonore peut directement influencer les fluides de l’oreille interne.
Cette influence directe sur les fluides peut stimuler les capteurs de mouvement dans les canaux semi-circulaires, qui sont normalement activés uniquement par des mouvements de tête.
En conséquence, le cerveau reçoit des signaux erronés indiquant que la tête est en mouvement alors qu’elle est en réalité immobile, ce qui provoque des sensations de vertige ou de déséquilibre.

    • Symptômes Associés :

Les symptômes déclenchés par le phénomène de Tullio peuvent varier en intensité et incluent souvent des vertiges, des sensations de rotation, et des troubles de l’équilibre. Dans certains cas, les sons peuvent même déclencher des symptômes vestibulaires sévères comme une chute ou une perte d’équilibre soudaine (crises de Tumarkin).
Diagnostic et Traitement :

Le phénomène de Tullio est un indice diagnostique important pour le syndrome de Minor. Les médecins peuvent utiliser des tests audiologiques spécifiques pour évaluer la sensibilité aux sons.
Le traitement dépend de la gravité des symptômes et peut inclure des mesures conservatrices, des thérapies de réadaptation vestibulaire, ou dans certains cas, une intervention chirurgicale pour corriger la déhiscence osseuse.

Comment le diagnostiquer? Le diagnostic du syndrome ORL de Minor

Le diagnostic du syndrome ORL de Minor, également connu sous le nom de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur, implique une combinaison d’examens cliniques, de tests diagnostiques et d’évaluations des symptômes rapportés par le patient. Voici les étapes clés pour diagnostiquer ce syndrome :

  • Anamnèse :

Un examen approfondi des antécédents médicaux et des symptômes du patient est crucial. Les médecins s’intéressent particulièrement aux symptômes comme les vertiges, l’autophonie (entendre sa propre voix résonner dans la tête), la sensibilité aux bruits corporels, et les changements dans l’audition.
Examen Physique : Un examen ORL complet est effectué pour exclure d’autres causes possibles des symptômes.
Tests Auditifs et Vestibulaires :

  • Audiogramme :

Un test d’audition standard pour évaluer la capacité auditive du patient. Une audiométrie tonale, vocale en conduction aerienne et en conduction osseuse doit être réalisée. Les caratcteristiques de l’audiométrie sont les suivantes:

    • Conduction Osseuse Supranormale :

L’un des signes les plus caractéristiques du syndrome de Minor est une conduction osseuse supranormale. Cela signifie que, lors du test d’audiométrie, les sons transmis par conduction osseuse (via un vibrateur posé sur l’os mastoïde ou le front) sont perçus à un niveau plus bas (plus silencieux) que la normale. Ce phénomène est dû à la “troisième fenêtre” créée par la déhiscence, qui permet une transmission plus efficace des sons par la voie osseuse.

    • Seuils Aériens Normaux ou Légèrement Réduits :

Les seuils auditifs pour la conduction aérienne (sons transmis par l’air via des écouteurs) sont souvent normaux ou légèrement réduits. Cela dépend de l’étendue de la déhiscence et de son impact sur la mécanique de l’oreille moyenne.

    • Présence de l’Effet Carhart :

Dans certains cas, l’effet Carhart, une élévation artificielle du seuil de conduction osseuse, peut être observé. Cet effet est dû à une perturbation de la mécanique de l’oreille interne causée par la déhiscence.

    • Rinne absent ou négatif:

Habituellement, dans l’audiométrie, les seuils de conduction osseuse sont légèrement meilleurs que ceux de la conduction aérienne. Dans le syndrome de Minor, cet écart peut être nul ou même négatif, du fait de la meilleure perception des sons par conduction osseuse.
Réponse aux Sons à Basses Fréquences :

Les patients avec le syndrome de Minor peuvent montrer une sensibilité accrue aux sons à basses fréquences, en particulier lorsqu’ils sont transmis par conduction osseuse.

  • Imagerie Médicale :

Tomodensitométrie (TDM) de l’oreille interne : C’est l’examen d’imagerie le plus important pour diagnostiquer le syndrome de Minor. Il permet de détecter une éventuelle déhiscence osseuse au niveau du canal semi-circulaire supérieur.
Imagerie par résonance magnétique (IRM) : Bien que moins couramment utilisée pour ce syndrome, l’IRM peut être utile pour exclure d’autres pathologies.

  • Test de Valsalva :

Il s’agit d’un test simple où le patient tente d’exhaler avec la bouche et le nez fermés. Ce test peut parfois reproduire ou aggraver les symptômes chez les personnes atteintes du syndrome de Minor, mais il n’est pas spécifique à cette condition.

  • Les potentiels évoqués otolithiques:

(PEO ou VEMP), qui montrent typiquement des signes qui permettent de confirmer le diagnostic.

En raison de la complexité des symptômes et de la similitude avec d’autres troubles, la consultation avec un ORL spécialisé en troubles de l’équilibre et de l’audition est souvent recommandée.

Il est important de noter que le diagnostic du syndrome de Minor peut être difficile, car ses symptômes peuvent se chevaucher avec ceux d’autres troubles. De plus, une petite déhiscence osseuse détectée par l’imagerie ne provoque pas nécessairement de symptômes chez tous les individus. Par conséquent, la corrélation entre les résultats d’imagerie et les symptômes cliniques est essentielle pour un diagnostic précis.

Quels traitements? La prise en charge et traitements du Syndrome de Minor

  • Gestion Conservatrice :

Modification du Comportement : Éviter les activités ou les positions qui déclenchent ou aggravent les symptômes.
Thérapie Vestibulaire : Des exercices de rééducation vestibulaire peuvent aider à améliorer l’équilibre et à réduire les vertiges.
Médicaments : Des médicaments comme les antivertigineux ou les antiémétiques peuvent être utilisés pour gérer les symptômes tels que les vertiges et les nausées.

  • Traitement Interventionnel :

Plâtrage Tympanique : Des petites masses peuvent être ajoutées sur le tympan pour modifier sa résonance et réduire la sensibilité aux sons, ce qui peut aider dans les cas de phénomène de Tullio.

  • Chirurgie :

Réparation de la Déhiscence : La chirurgie est envisagée lorsque les symptômes sont sévères et n’améliorent pas avec les traitements conservateurs. Les techniques chirurgicales incluent :

    • Colmatage de la Déhiscence : Utilisation de tissus mous ou de matériaux synthétiques pour recouvrir la zone de déhiscence.
    • Fermeture du Canal Semi-Circulaire : Blocage du canal affecté pour prévenir la stimulation anormale par les sons ou les pressions.
    • Chirurgie de l’oreille moyenne : Dans certains cas, une intervention sur l’oreille moyenne peut être nécessaire pour améliorer les symptômes auditifs.

La chirurgie par voie sus-pétreuse consiste à “boucher l’endroit qui est ouvert en soulevant le cerveau et la méninge pour arriver sur le toit de l’oreille”. Un geste délicat, à réaliser en quelques secondes.
La chirurgie par voie transmastoïdienne est plus simple, “mais peut-être plus dangereuse encore pour l’audition” : elle consiste à “traverser l’oreille et boucher l’amont et l’aval de la déhiscence”.

  • Traitement des Conditions Associées :

Si des conditions comme les migraines ou les troubles de l’anxiété sont présentes et exacerbent les symptômes, un traitement spécifique pour ces conditions peut également être nécessaire.

  • Appareillage auditif:

L’appareillage auditif va permettre de prendre en charge la surdité afin de mieux entendre, soulager les acouphènes et éventuellement gérer l’hyperacousie. Les appareils auditifs doivent être réglés de façon très spécifique pour une bonne prise en charge du Syndrome de Minor.

  • Suivi Régulier :

Un suivi régulier avec un ORL spécialisé est important pour évaluer l’efficacité des traitements et ajuster le plan thérapeutique si nécessaire.
Il est crucial que le traitement soit personnalisé en fonction des symptômes spécifiques de chaque patient, de la sévérité de la maladie, et de l’impact sur sa vie quotidienne. La décision de procéder à une intervention chirurgicale, en particulier, doit être soigneusement pesée en tenant compte des avantages potentiels et des risques. La consultation avec des spécialistes en ORL, en audiologie, et parfois en neurologie est souvent bénéfique pour une gestion optimale de ce syndrome.